Le prix du gratuit

Notre monde est ainsi fait que désormais, nous autres consommateurs, citoyens, salariés… sommes habitués à disposer de beaucoup de produits et de services gratuits.

Vous voulez un exemple ? La multiplication des MOOC donne accès à des ressources intellectuelles quasi infinies, et gratuites pour la plupart. Dans un domaine connexe, c’est aussi le cas de nombre d’ateliers proposés dans des espaces de coworking.

Est-ce une aubaine et le signe que notre société se porte bien, ou au contraire un symptôme qui devrait générer de l’inquiétude ?

En tout cas, cette gratuité suscite 3 questions fondamentales :

    • Comment ces modèles pourraient-ils être pérennes s’ils ne sont pas sous-tendus par un modèle économique viable ?
    • Quelle est la valeur perçue de ce qui est gratuit ?
  • Quel est le vrai prix à payer derrière le gratuit ?

La pérennité des modèles gratuits

Dans plusieurs secteurs d’activité, et notamment depuis l’émergence de l’économie circulaire et collaborative, il arrive fréquemment qu’un modèle gratuit apparaisse, casse les règles du marché, s’empare ainsi de parts de marché significatives et passe ensuite progressivement à un modèle payant :

La première évolution consiste en un système d’options, conservant l’accès gratuit pour des fonctionnalités basiques et proposant des services additionnels payants (Le Bon Coin, qui devient payant au-delà de 3 photos par annonce ou encore MailChimp qui envoie gratuitement vos campagnes d’e-mailing jusqu’à 2000 destinataires), c’est ce qu’on appelle le Freemium ou encore l’In-app purchase (lorsque vous utilisez une application mobile gratuitement, mais débloquez ensuite certaines fonctionnalités en payant, pour certains niveaux de jeux par exemple).

La seconde évolution est la généralisation d’un modèle payant avec des tarifs qui restent abordables pour le plus grand nombre (Air BnB, qui prélève 3% de frais à l’hôte pour chaque réservation). C’est le cas de nombre d’applications mobiles (celles qui ont trouvé leur public en tout cas), qui ont créé et testé des usages en version gratuite, pour ensuite devenir payantes : l’industrie de l’app mobile représente aujourd’hui un chiffre d’affaires de 30 milliards d’euros par an au niveau mondial, soit quasiment autant que l’industrie du cinéma (source).

Dans le cas des MOOC, il s’agit également souvent d’un système à option, avec des cours et l’accès aux différentes ressources (documentation, forum…) qui restent gratuits et un certification final qui devient payant. Pour les ateliers en espaces de coworking, les lieux dont la communauté est friande de nouveautés accepte aujourd’hui de payer pour certains contenus : soit ils le font à « prix libre », auquel cas certains jouent le jeu et d’autres pas du tout ;-), soit l’offre se professionnalise lorsque ces ateliers peuvent s’apparenter à des formations en tant que telles (Mutinerie par exemple a créé sa propre School).

Quoi de plus louable que d’offrir cet éveil intellectuel au plus grand nombre ? Ou encore des produits alimentaires en libre-service dans les rues ? Oui, mais n’oublions pas que toutes ces initiatives ont un coût, indubitablement. Il est assumé par une association, une entreprise, une collectivité locale… qui a un intérêt à ce que ces pratiques soient diffusées. Il faut alors se poser la question des motivations de cette générosité : intérêt collectif ? fidélisation ? électoralisme ? marketing-produit ? lobbying ? désinformation ?? C’est une vraie question que vous devez vous poser quand vous intégrez un tel dispositif. Si l’initiative vous paraît réellement désintéressée, ou prône des valeurs collaboratives auxquelles vous adhérez, il n’en reste pas moins qu’il est toujours important de conserver du recul par rapport à ce qu’on vous y raconte et d’aller vous-même croiser les informations que vous recevez. A l’inverse, si vous avez l’impression d’avoir bénéficié d’un contenu de qualité, qui a répondu à vos attentes, il semblerait logique que vous en payez un juste prix : publicité en faveur du programme, mise en relation, don, investissement en temps…

Et pourtant… seuls 30 % des 15 / 25 ans se disent prêts à payer pour des images, 34 % pour de la musique et 40 % pour des jeux en ligne. Et après 25 ans, les volontaires pour ouvrir leur porte-monnaie sont encore moins nombreux : 23 % pour le cinéma en ligne, 18 % pour la musique et 28 % pour les jeux. A noter que toutes catégories d’âge confondues, les possesseurs de smartphones sont nettement plus prêts à payer que les autres pour toutes les activités précédentes (source). A méditer…

La valeur perçue du gratuit

pepiteMon dernier manager en entreprise m’aura appris une chose : « Ce qui est gratuit n’a pas de valeur ». A l’époque, j’ai trouvé ça très caricatural et assez contestable comme postulat. Mais aujourd’hui, en tant qu’entrepreneur, je peux vous le confirmer : donner sans contrepartie est souvent dévalorisé. Je ne dis pas qu’il ne faut jamais faire de « cadeau », mais dans le cas d’une relation professionnelle, il est logique que tout travail mérite salaire. Pas forcément en monnaie sonnante et trébuchante, cela peut être un échange de bon procédé : tu m’aides, je te rends la pareille. Tu me fais de la pub sur les réseaux sociaux, je t’envoie un prospect.

Encore un exemple : en tant qu’espace de coworking, on est sollicité très régulièrement par des porteurs de projet qui souhaitent eux aussi se lancer dans l’aventure. Dans la philosophie d’un secteur très open source, il est normal d’accueillir ces petits nouveaux avec bienveillance. Sauf que… Beaucoup viennent comme on va au marché : j’aurais besoin de votre business plan, votre bilan, votre plan marketing… merci, au revoir, plus de nouvelles. C’est ça, l’esprit collaboratif ? J’ai rapidement dessiné une offre propre à accompagner ces porteurs de projet, moyennent salaire. Et bien figurez-vous que ceux qui sont réellement sérieux dans leur démarche ne rechignent pas, dès lors que le tarif reste abordable, à investir pour leur projet : et ce sont eux qui donnent des nouvelles et qui deviennent ensuicollabote de réels partenaires de notre écosystème ! Consultez notre offre de conseil et de formation.

Autre exemple qui illustre bien la valeur donnée au gratuit : notre espace de coworking a souhaité soutenir Place à l’Emploi lors de la semaine organisée fin novembre 2016 en faveur des demandeurs d’emploi et de leur réinsertion professionnelle. A ce titre, 2 ateliers totalement gratuits ont été programmés : le premier comptait 5 inscrits. Finalement, seuls 4 se sont déplacés. Rappelé à l’heure de l’atelier, le 5ème ne se souvenait même pas s’y être inscrit. Le second atelier affichait complet, avec 12 participants inscrits, empêchant donc d’autres personnes intéressées de rejoindre l’atelier : finalement, seules 7 personnes ont fait le déplacement, 2 des absents n’ayant donné aucune nouvelle et 3 ayant décommandé le jour-même.

Un nouvel outil surfe sur cette difficulté : la plateforme NoMoNoShow propose aux organisateurs d’événements de gérer des inscriptions en ligne : si la personne participe effectivement, elle ne paie rien, par contre elle se verra débitée si elle n’est pas venue sans prendre la peine d’annuler à l’avance. Pas bête ?

L’idée est bien sûr de responsabiliser les bénéficiaires de ce foisonnement d’événements, qui ont tendance à s’inscrire à la légère à tout et n’importe quoi, sans même le noter parfois, et donc de ne pas s’y rendre ensuite, sans aucun scrupule pour l’organisateur qui aura prévu une intendance en fonction d’un nombre d’inscrits, parfois très éloigné de la réalité. Je sais que vous, lecteur, vous dites en ce moment : « Mais ça peut arriver d’avoir un imprévu de dernière minute ! ». C’est vrai… Mais pensez à la dernière fois où vous avez finalement annulé votre participation à un événement. Si, si, faites un effort… Dans 90% des cas, c’est de la grosse flemme, du genre « J’avais eu une grosse semaine, j’étais trop crevé… ». Typiquement, si vous prévoyez trop d’événements, vous êtes à peu près sûr de ne finalement pas vous rendre à la moitié.

Le vrai prix du gratuit

Vous devez l’avoir appris de vos grands-parents ou en regardant Once Upon a Time : tout a un prix. Quel est celui du gratuit ?

Plusieurs effets notoires sont incontestables : certaines industries ont beaucoup souffert et ont vu la diversité et la richesse de leur offre grandement diminuées par l’introduction de la gratuité : l’exemple de l’industrie musicale est éloquent. L’effet bénéfique malgré tout est qu’il a poussé certaines artistes à multiplier les concerts et les événements, qui deviennent aujourd’hui leur principale source de revenus, à défaut de vendre des CD.

Autre conséquence du gratuit : qui dit perte de revenus dit restrictions budgétaires et donc casse sociale. Les rédactions de la presse traditionnelle en savent quelque chose, ayant subi de plein fouet l’arrivée des journaux gratuits. On pourra évidemment leur objecter qu’ils n’ont pas su s’adapter aux nouveaux modèles de communication digitale, retard qu’ils essaient aujourd’hui de combler. Si le sujet vous intéresse, vous pouvez l’approfondir par la lecture de cet article.

donneesEnfin, un effet plus sournois et indirect du gratuit est le recueil de plus en plus chronique de données personnelles, en échange de l’accès à tel produit ou service. Qui n’a pas déjà rempli un questionnaire pour recevoir une contrepartie ? Vous êtes donc fiché, étudié, marketé, sollicité… Vous êtes devenu un prospect qualifié. Evidemment, rien ne s’y oppose, mais c’est bien d’en être conscient. Big Brother is watching you…

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Alors, et vous ? Quel consom’acteur êtes-vous ? Aviez-vous conscience de tous ces effets du gratuit ? Et puis, il y aussi des choses qui de toute façon ne s’achètent pas… Je suis preneuse, comme d’habitude de vos commentaires sur les réseaux sociaux : Facebook, LinkedIn, Twitter.

Le culte du bonheur obligatoire menace nos lieux de travail – Article d’André Spicer, traduit de l’anglais par Blandine Cain (traduction libre)

Article d’André Spicer, traduit de l’anglais par Blandine Cain (traduction libre)

Certaines entreprises font tout pour que leurs bureaux soient fun, pour nous faire travailler plus. Mais l’attitude positive à tout prix a des effets contre-productifs.

Dans leur quête de rendre leurs salariés plus heureux, les entreprises, partout dans le monde, se sont attelées à installer dans leurs espaces de travail des équipements ludiques. Dans ses bureaux de Zurich, Google a mis en place des toboggans pour que ses ingénieurs puissent glisser d’un étage à l’autre. Le vendeur de chaussures en ligne Zappos encourage ses employés à se déguiser en leur animal favori certains jours. Il existe des sociétés américaines qui offrent à leurs équipes la possibilité de jouer aux ninjas d’un jour. Baby-foots, jeux d’arcade, figurines et scooters ont investi les bureaux. Et si vous pénétrez dans les locaux d’Inventionland, vous pourriez vous croire dans une aire de jeux pour enfants : les espaces de travail ressemblent qui, à un bateau-pirate, une cabane perchée ou une chaussure géante.

Les tentatives des entreprises pour que leurs salariés soient heureux de passer de plus longues heures au boulot ne s’arrêtent pas là : Tony Hsieh, DG chez Zappos, est réputé pour boire des shots de vodka avec ses employés pendant certaines réunions. Chez Expedia, élu cette année comme le lieu de travail le plus agréable au Royaume-Uni, a conçu ses bureaux londoniens comme une boîte de nuit avec boissons à volonté, espaces détente et simulateurs de F1.

Dans The Wellness Syndrome, le livre écrit par André Spicer et Carl Cederström, les auteurs ont étudié la fascination croissante pour le bonheur au travail. Ils ont découvert une industrie montante pour les « fun-sultants » qui offrent leurs conseils pour favoriser l’esprit positif au sein des équipes. Des entreprises comme Zappos ont commencé à embaucher des Chief Happiness Officers : des responsables du bonheur.

Les recherches dans le domaine de la positivité au travail explosent également.

Malgré tous ces efforts, le travail « craint » toujours autant.

Si l’on en croit une étude récente de la London School of Economics, le lieu dans lequel on se sent le moins bien est encore et toujours le lieu de travail. Il existe un seul lieu qui nous fait nous sentir encore plus mal – malade au lit.

L’injonction d’être heureux au travail est téléguidée par l’un des plus vieux clichés du mode d’emploi du parfait DRH : un travailleur heureux est un bon travailleur. Comme le démontre William Davies dans son livre The Happiness Industry, cette idée a infusé les théories managériales depuis les années 30. Pourtant, des décennies de recherche sur le lien entre satisfaction des salariés et productivité font état de résultats peu probants.

Certaines études prouvent que des étudiants ayant assisté préalablement à un spectacle de stand-up vont être plus performants ensuite dans le repérage d’erreurs dans un texte, par rapport à ceux qui n’y auraient pas assisté. A l’inverse, une autre étude, menée par une grande enseigne de la distribution au Royaume-Uni, a conclu que les magasins dont les employés étaient les moins satisfaits par leur travail obtenaient la meilleure productivité et étaient les plus rentables.

Le bonheur au travail peut être positif dans certains métiers – notamment ceux qui impliquent du relationnel client où cela aura un impact positif sur les clients eux-mêmes -, mais certains indices tendent à penser que le bonheur pourrait devenir néfaste dans d’autres. Une étude, par exemple, a identifié que la mauvaise humeur pourrait fournir de meilleurs résultats que la bonne dans un contexte de négociation. De même pour la capacité à démasquer une arnaque.

Si le bonheur au travail ne va pas toujours dans le sens de la productivité, est-il néanmoins positif pour chaque individu ?

Ce postulat n’est pas toujours confirmé non plus.

Le diktat du bonheur impulsé dans les entreprises vient interdire d’autres émotions : colère, tristesse, anxiété ou incertitude – toutes les composantes de l’environnement de travail contemporain –. Ce tabou implicite des émotions négatives peut ainsi inhiber émotionnellement les salariés. Plusieurs études récentes montrent que l’expression des émotions, tant positives que négatives, est importante, particulièrement lorsque l’on est confronté à des expériences difficiles.

Donner une place à toutes les émotions au travail peut aussi se révéler positif pour la santé de l’entreprise toute entière. Une récente étude l’illustre parfaitement avec l’analyse de l’échec du fabricant de téléphones mobiles Nokia. En 2007, l’année du lancement de l’iPhone, Nokia était le leader mondial du secteur. Les informations relatives à cette sortie d’Apple étaient massives, et auraient pu permettre de la contrecarrer.

Pourtant, l’entreprise finlandaise a lourdement investi dans le système opérationnel Symbian pour son projet de smartphone, qui ne fonctionnait pas correctement. Les cadres intermédiaires de l’entreprise le savaient, mais ils avaient peur de partager ces mauvaises nouvelles avec leur hiérarchie. On leur avait donné pour consigne : si vous voulez que votre département soit maintenu, soyez positifs et donnez-nous de bonnes nouvelles.

Parce que les cadres dirigeants ne recevaient que les bonnes nouvelles, ils ont mis longtemps à identifier le problème, et encore plus à mettre à niveau le système Symbian et à lancer un smartphone digne de ce nom. A ce moment-là, Apple et Samsung avaient inexorablement dépassé Nokia. Aujourd’hui, Nokia ne fabrique plus de téléphones portables.

bureau-atypique

Vouloir constamment exprimer du positif peut conduire à ce que le bonheur nous échappe.

Ce point a été illustré dans une étude dans laquelle des psychologues ont demandé à deux groupes de réaliser une activité qui rend habituellement les gens heureux – regarder un film où quelqu’un gagne une compétition de patinage. Ensuite ils ont testé à quel point cette expérience les avait rendus heureux. Avant de regarder cette vidéo, le premier groupe avait lu un texte expliquant pourquoi il était important d’être heureux et d’avoir une attitude positive ; l’autre groupe n’avait pas lu ce message.

Les psychologues ont découvert que le second groupe montrait plus de signes de bonheur après la vidéo que le premier. Cela suggère que l’injonction exprimée d’être heureux à tout prix nous en éloigne, même si nous faisons l’expérience de situations qui rendent logiquement heureux.

Vouloir être heureux au travail est normal. Mais être poussé à paraître heureux au travail est perturbant. Si des entreprises voulaient vraiment rendre leurs salariés heureux au travail, alors elles arrêteraient probablement les clowneries de bureau et réfléchiraient à des actions moins visibles.

Une première étape pourrait consister à laisser leurs collaborateurs travailler de chez eux une partie du temps. Une étude expérimentale a, cette fois, établi que le travail à domicile augmentait à la fois la satisfaction et la productivité du salarié.

Une seconde action pourrait être de ne plus interrompre le travail par toutes sortes de demandes secondaires incarnées par des e-mails à rallonge, des formulaires administratifs ou des « activités de bonheur obligatoire ».

Une étude de chercheurs de la Harvard Business School a démontré que les travailleurs se sentaient plus satisfaits au travail les jours où ils étaient en mesure de se concentrer sans interruption et donc de voir progresser leur travail de manière visible.

Enfin, supprimer l’incertitude intrinsèque à certains environnements de travail peut avoir des effets notoires sur le bonheur au travail. Durant son travail conjoint avec Mats Alvesson, André Spicer a évalué plusieurs projets de restructuration et de conduite du changement, qui ont finalement pour résultats de faire certes apparaître quelques étoiles montantes parmi les managers, mais surtout de générer une grande déception des équipes et de s’accompagner d’honoraires mirifiques de consultants.

Les organisations hiérarchisées peuvent-elles rendre leurs employés heureux, sans toboggans et sans shots de vodka ? Réfléchissez à deux fois avant de lancer vos projets d’entreprise…

Retrouvez l’article dans sa version originale.

Plutôt que de vous proposer une réflexion personnelle ce mois-ci, j’ai donc choisi de partager cet article pour son point de vue décalé, qui se place à contre-courant de l’arrivée massive de Chief Happiness Officers au sein de toutes les entreprises qui se veulent sympas et motivantes pour leurs collaborateurs. Personnellement, je ne partage pas tous les postulats de cet article, mais je pense qu’il nous faut effectivement être vigilant pour ne pas tomber dans une caricature pré-formatée de ce que doit être l’ambiance au travail. Mon avis n’est pas définitif,  je réfléchis encore et je suis preneuse de tous vous commentaires !

Depuis ma lecture de cet article et ce petit travail de traduction, je suis aussi tombée sur un nouvel article qui revient sur le cas de l’entreprise Zappos et sur ce qui ressemble à l’échec de son management holacratique : à lire également pour une mise en perspective d’un sujet connexe.

Les 4 combats intérieurs de la maman qui travaille

En tant que maman qui travaille, la vie est dure… et belle… et dure… et belle. Vous l’aurez compris, j’ai une fâcheuse tendance à la schizophrénie. C’est ça, être maman au 21ème siècle !

Bien réveillée dès le saut du lit, organisée mais pas stressée avant de partir à l’école, souriante et énergique pendant la journée de travail, efficace pour les opérations courses ou RDV avant le retour à la maison, à l’écoute et bienveillante le soir venu… Pour tous ceux qui ont vu les sketchs de Florence Foresti, il y a donc la maman parfaite, et l’autre. J’essaie de me maintenir à cheval entre les deux. Trop parfaite, c’est trop lisse. Trop imparfaite, c’est pas cool pour la progéniture, qui souvent en subit les dommages collatéraux.

Mais alors, c’est quoi, ce juste milieu ? Vaste débat.

Loin de moi l’idée de faire la leçon et de proposer des solutions miracles. Je couche simplement sur le papier quelques réflexions qui m’ont occupée durant de longues soirées de remise en question, et qui m’ont permis de mieux vivre ma situation de femme-orchestre depuis. Voire, de kiffer grave.

1. Ne pas culpabiliser et encore moins chercher à compenser

Mais au fait, pourquoi ai-je continué à travailler si c’est pour confier mon enfant à d’autres, ne plus profiter de lui à temps plein et donc finalement ne plus l’éduquer directement ?

Parce que j’en ai besoin ! J’ai besoin d’avoir une vie sociale extérieure à celle du cercle des mamans de l’école. J’ai besoin d’être reconnue pour des compétences autres que celles de bien s’occuper de mon enfant et de la maison. Et en plus, soyons honnête, je déteste les tâches ménagères, alors autant gagner de l’argent à faire quelque chose qui me plaît, pour pouvoir ensuite payer quelqu’un d’autre pour les faire (mieux que moi) à ma place.

Ce choix de travailler, il faut l’assumer. Ne pas rougir en reconnaissant que vous en avez besoin, que c’est une part constitutive de votre épanouissement. Même si oui, les premières séparations, le retour au bureau… ont été une épreuve terrible pour moi, malgré les conditions idéales de cette reprise, puisque mon mari a pris 3 mois de congés à son tour pour s’occuper de notre fils avant son entrée à la crèche à 6 mois.

7-syd-mel-40Si vous assumez pleinement vos choix, vous n’aurez plus à culpabiliser quand vous laisserez votre enfant une heure de plus le soir à la garderie. Cette heure de plus, elle n’a absolument aucune importance si vous récupérez ensuite votre enfant sereine, psychologiquement disponible et prête à passer un bon moment ensemble, même s’il est court. Qu’il soit court et intense.

C’est par cette qualité de la relation que vous assurez une sécurité émotionnelle à vos enfants. Pour certaines personnes, la culpabilité se transforme parfois en compensation : un petit cadeau par-ci, un caprice auquel on cède par-là… Objectivement, vous croyez vraiment pouvoir acheter l’amour d’un enfant ? Il va certes profiter de ce que vous lui offrez, mais pour autant, il ne va toujours pas se sentir en sécurité et il en demandera vraisemblablement de plus en plus, car cette substitution ne fait pas vraiment illusion et ne comble pas son désir réel d’attention : vous en faites un consommateur insatiable, jamais satisfait.

Autre astuce du parent culpabilisé : inscrire son enfant à pléthores d’activités extra-scolaires. C’est une bonne idée si l’enfant en a envie et s’il peut choisir ses activités. Sinon, c’est lui créer des temps additionnels en collectivité, alors que les journées d’école sont déjà longues, et ne pas lui permettre une chose fondamentale : glandouiller, s’ennuyer, avoir du temps LIBRE, être avec vous.

2. S’organiser pour optimiser son temps et améliorer sa qualité de vie

Vous aussi, vous êtes à la recherche d’une baguette magique pour que vos courses se fassent toutes seules, tout comme les lessives et autres joyeusetés…?

Alors évidemment, je n’ai pas trouvé de baguette, bien que mon fils m’en ait proposé une :

  • lui : Je vais te donner un peu de la magie que j’ai dans le cœur
  • moi : Ah, super ! Je vais pouvoir faire des courses sans me déplacer, comme ça ??
  • lui : Ah non, désolé, j’ai pas de magie de courses, mais par contre tu pourras aller très vite

Bon, après essai, ça marche moyen, mais c’est l’intention qui compte.

J’ai donc essayé d’autres techniques et là encore, il s’agit d’un avis tout personnel et donc subjectif :

Manger bon, de saison, et si possible local et bio

Pas facile, facile… Il y a bien la Ruche qui dit oui, mais en l’occurrence, celle près de chez moi a fermé et les producteurs n’ont pas l’air convaincu par le modèle en zone rurale : trop peu de volumes pour le temps passé, et donc une rentabilité très faible pour eux.

Faire le tour des producteurs et éleveurs du coin ? Difficilement compatible avec la vie trépidante d’une maman qui travaille, même si une virée ponctuelle est très rafraîchissante (mais je ne vous parle pas de mon bilan carbone !).

img_0170Les AMAP ? Beaucoup en sont revenus, désemparés par les paniers hebdomadaires tous identiques pendant nos longs hivers parisiens, avec son trop-plein de blettes et de patates…

J’ai trouvé MA solution (attention, je n’ai pas de parts dans la société). C’est un peu une solution de princesse j’en conviens, et elle est encore perfectible, mais jugez plutôt : Quitoque propose des paniers hebdomadaires, livrés à domicile, à composer en fonction de la taille de votre foyer et de vos goûts (végétarien ou non). Chaque panier est livré accompagné de recettes simples à mettre en œuvre. Si vous n’êtes pas là cette semaine-là, vous pouvez annuler votre commande sans frais. Idem si vous n’aimez pas les recettes proposées. Pour moi, l’avantage est triple : des produits qui viennent à vous, des plats qui s’inventent sans se creuser la tête, et des menus qui changent avec la découverte de produits et saveurs parfois inconnus. Que demande le peuple ? Les moins ? Ce n’est pas donné (en valeur absolue), mais je trouve que c’est néanmoins un bon rapport qualité-prix. En tout cas, je suis prête à payer ce prix-là pour cette prestation.

Décompresser !!!

Gagner du temps, c’est aussi savoir en perdre, en tout cas en consacrer à des activités non productives. Qui ne mènent à rien. Qui font du bien. Tout de suite, vient en tête un spa avec jacuzzi et massage… Alors je dis oui, mais qui peut se payer un abonnement hebdomadaire ? Pas moi en tout cas. Je le fais ponctuellement, parce qu’effectivement ça fait du bien. Mais quand je parle de décompresser, je pense à des activités bien plus accessibles : un apéro entre copines, une soirée pizza-foot avec son mari et ses potes, une sortie ciné, un bon bouquin… Les choix sont variés en fonction des goûts et des envies de chacun. En tout cas, ça paraît indispensable pour se sentir bien.

Personnellement, j’ai aussi opté pour des MOOC qui me donnent l’occasion de découvrir ou d’approfondir mes réflexions sur certaines thématiques comme le travail flexible, la conception d’ « oasis », l’éducation, l’économie circulaire… En plus des apprentissages prodigués, c’est une occasion unique d’échanger avec des personnes qui ont les mêmes centres d’intérêt et donc de se créer un réseau riche qui permet d’envisager pleins de projets… Ah oui, j’ai oublié de vous dire, je fonctionne en mode projet et j’ai sans arrêt besoin de nouveaux challenges pour me sentir vivante…

Bon, on ne peut pas dire qu’on gagne beaucoup de temps avec ce type d’activités, mais par contre, on a l’impression de bien l’utiliser et de construire.

Se créer un cadre de travail propice

Chacun a ses propres critères en la matière et tous n’ont pas le choix.

La plupart des salariés doivent encore subir des trajets pendulaires parfois laborieux pour se rendre à leur bureau le matin et rentrer chez eux le soir. Néanmoins, une vraie brèche s’est ouverte avec la naissance du télétravail et l’éclosion des espaces de coworking. Késako ?

Plutôt que de faire des trajets inutiles, au lieu de rester isolé à travailler seul chez soi dans des conditions parfois imparfaites, plutôt que de se bloquer avec un bail de location classique sans flexibilité…, l’espace de coworking vous propose un bureau nomade ou résident pour travailler en toute autonomie dans un lieu partagé, parfaitement équipé et offrant de multiples services. Sans parler du réseau professionnel auquel il vous donne accès et qui peut constituer une réelle opportunité pour votre business si vous êtes indépendant. Evidemment, dans ces conditions, on appréhende les journées de travail différemment.

Pour plus d’infos, vous pouvez découvrir une large palette de lieux sur www.copass.org.

3. Savoir apprendre de ses enfants et reconnaître que l’on s’est trompé

Un jour que j’étais au volant, avec mon fils à l’arrière, je m’énerve à voix haute sur « ce gros lent devant », qui n’avançait pas. J’entends alors une petite voix qui vient de derrière-moi et qui me dit : « On est pressés, maman…? ». Et bien non. Nous n’étions pas pressés. Je m’étais juste conditionnée à être désagréable et à ne pas tolérer que quelqu’un devant moi n’ait pas le même rythme frénétique que moi.

img_0174Ce que je veux dire ici, c’est que nos enfants, et leur incroyable candeur, leur bon sens aussi, nous apportent parfois les réponses à nos questions les plus complexes et à nos problèmes existentiels : parfois, vivre simplement dans l’instant présent procure bien-être et réconfort, tandis que nos projections de course sans fin sont anxiogènes et nous empêchent de profiter des bons moments.

C’est souvent dans ces contextes de stress que nous sur-réagissons à la conduite de nos enfants : si nous prenions ne serait-ce que 2 secondes avant de réagir, la plupart du temps, nous aurions conscience qu’il n’y a rien de grave. Pas de risque pour leur sécurité, leur intégrité physique, ni même d’insolence crasse ou de parole déplacée…? Un simple recadrage sans hurlement ni punition peut suffire. OK, ce n’est pas toujours le cas. Mais le simple fait d’avoir des réactions proportionnées, et donc graduelles, procure des repères beaucoup plus lisibles pour un enfant, qui sait ensuite faire la différence entre une petite bêtise et une très grosse.

Si on s’est trompé, si on a traité son enfant injustement, il est également possible de le lui dire et de s’excuser, comme on lui demandera de faire la même chose dans le cas contraire. Il s’agit là d’un principe éducatif non plus bâti sur la crainte et la domination, mais sur l’écoute bienveillante et le cadrage structurant.

J’en entends déjà certains : plus facile à dire qu’à faire !! Et comment fait-on avec les vrais durs, les têtes de pioche ? Si vous vous posez cette question, je vous invite à lire l’excellent ouvrage de Céline Alvarez : Les lois naturelles de l’enfant. Elle explique quels schémas elle a mobilisé pour emmener toute une classe d’enfants de Gennevilliers vers la sérénité, l’entraide et un apprentissage épanouissant et performant. Totalement bluffant : elle démontre qu’avec une telle approche, on peut embarquer tout le monde, sans laisser personne sur le carreau.

4. Avoir pour objectif ultime l’envol épanoui de son enfant

Mais alors, avec un temps partagé réduit, continue-t-on à éduquer ses enfants ? Sont-ils encore les « nôtres » ?

D’abord, nos enfants ne nous appartiennent pas. Nous les avons conçus pour qu’ils deviennent des 7-syd-mel-88adultes autonomes et indépendants. Non ? Peut-être que là, j’en ai perdu certains… En tout cas, c’est vraiment ma conception. Faire pousser le plus droit possible un nouvel être qui a son tempérament, ses forces, ses faiblesses, ses parts de lumière et d’ombre, et l’aider à comprendre et à appréhender ce monde en lui apportant un cadre, des valeurs… qui feront en théorie de lui quelqu’un de bien : responsable, socialement clairvoyant, altruiste, volontaire, gentil, courageux, ingénieux… et surtout, heureux ! Par conséquent, c’est très bien que nos enfants soient confrontés à différents univers au cours de leurs journées. Ils prennent ainsi du recul, aiguisent leur esprit critique, développent leur libre-arbitre… Les mettre sous cloche durant leur enfance reviendrait à reculer pour mieux sauter par la suite : il faudra bien qu’ils affrontent le monde un jour, et le plus tôt sera le mieux. D’autant que ce monde peut être beau.

Ensuite, qui a dit qu’il fallait passer 24h/24 avec une personne pour lui transmettre les fondamentaux ? Il ne s’agit pas de conditionner, ni de remplir le crâne de connaissances, mais bien de pousser à réfléchir, d’éveiller la curiosité, d’expliquer le monde… N’avez-vous pas, vous-mêmes, le souvenir d’un grand-père ou d’une autre figure, que vous ne voyiez pourtant pas au quotidien, mais qui a gardé une grande place dans votre esprit et dont vous avez appris beaucoup ? Ce n’est pas la quantité qui compte, mais bien la qualité.

96-cairns-5Enfin, pour l’avoir expérimenté avec mon fils, ce qui leur donne des ailes, ce qui les aide à développer une confiance en eux solide, c’est de s’enthousiasmer avec eux sur les petits riens du quotidien qui sont leurs vraies réussites personnelles, leurs défis, leurs découvertes ! J’adore quand mon fils m’interrompt pour me montrer un magnifique coucher de soleil, ou quand il me sort une de ses phrases chocs que vous retrouverez des échantillons disséminés dans cet article, y compris sous le coup de crayon de Tatienne Laplanche. Bref, de l’amour, du partage, des petits bonheurs…

Voilà où j’en suis de mes réflexions pour concilier une parentalité heureuse et une vie professionnelle épanouie. Rassurez-vous, je n’arrive pas à appliquer la moitié de mes propres préceptes à temps plein, mais j’essaie. Ce n’est pas un aboutissement, mais bien un chemin, donc je suis preneuse de tous vos commentaires, idées, trucs et astuces…

Les 10 livres qui ont marqué ma vie

Animer un espace de coworking revêt de nombreuses facettes. Parmi celles que j’ai mises en application avec beaucoup de plaisir, il y a la création d’une bibliothèque partagée. La nôtre compte aujourd’hui plus de 150 ouvrages.

Parmi eux, il y a quelques-uns de mes « best-sellers » personnels. Pas tous. Pour ceux qui ne sont pas coworkers au 50 Coworking, comme je suis hyper sympa, je vais partager ici leurs références, pour que vous alliez comme des grands vous les fournir chez votre libraire préféré.

J’ai réfléchi à ce qui faisait qu’un livre avait eu de l’importance pour moi. J’ai trouvé plusieurs réponses à cette question.

Les sagas qui nous entraînent dans des univers incroyables

Commençons par les centaines d’heures que j’ai passées loin, mais alors très loin, de notre planète Terre. La lecture a ce grand avantage qu’elle nous fait voyager sans avoir à partir très loin.

C’est vraiment le cas lorsqu’on plonge dans l’univers de Terry Pratchett et de ses Annales du disque-monde. Dans une ambiance moyenâgeuse fantastique, on croise des sorcières, des Dieux et même la Mort en personne, sans parler de la grande tortue A’Tuin qui ballade ce monde sur son dos. Formidable métaphore de notre société, j’ai personnellement un petit faible pour Mémé Ciredutemps, sorcière réac’ et d’une mauvaise foi légendaire. Ne vous attendez pas à des scénarios dignes du Seigneur des Anneaux, alliant gravité et actes de bravoure, mais plutôt à une folle danse endiablée que vous aurez du mal à suivre, mais qui vous fera mourir de rire. Si vous choisissez de partir à la découverte de ce monde, ne passez pas à côté des notes de bas de page, véritables pépites.

Moins déjanté mais tout aussi créatif, Anne Rice, rendue célèbre par son Entretien avec un dolmenvampire, nous a laissé une littérature extrêmement riche, notamment sa Saga des Sorcières. Nous sommes plongés dans une histoire familiale qui débute au 17ème siècle entre l’Ecosse et la Nouvelle-Orléans, faite de mystères, de drames et de malédictions… Il est des livres qu’on a du mal à laisser sur la table de chevet lorsqu’on éteint la lumière, de peur qu’ils ne s’animent pendant la nuit… Vous voyez ce que je veux dire ? C’est le cas de cette saga. Son troisième tome, Taltos, est une véritable apothéose : il peut être lu de manière indépendante si vous n’accrochez pas avec les deux premiers ouvrages. C’est également une très bonne tentative pour faire revenir des ados blasés à la lecture.

Beaucoup plus réaliste, la série Millénium de Stieg Larsson est aussi beaucoup plus dérangeante… Elle nous présente notre société sous ses pires auspices, avec une anti-héroïne comme on les aime : Lisbeth Salander est une jeune femme traumatisée mais forte, qui s’en sort seule tout en ayant besoin de liens, qui utilise des méthodes très « borderline », pour ne pas dire ultra-violentes, mais dont la part transgressive est justement jouissive pour le lecteur. Vous avez vu les films, les séries TV ? Lisez tout de même les livres, vous ne le regretterez pas. Si vous les avez déjà lus et que vous avez aimé cette ambiance, vous pouvez attaquer d’autres sagas nordiques, comme La Trilogie des Neshov, d’Anne Ragde : moins sensationnelle, cette série nous fait pénétrer dans le quotidien sordide d’une famille de paysans empêtrés dans de lourds secrets.

J’aurais pu citer beaucoup d’autres sagas qui m’ont totalement embarquée, y compris plus légères. Je pense notamment à celle qui débute avec Les yeux jaunes des crocodiles, de Katherine Pancol, que j’ai adorée. Mais je me suis dit que vous connaissiez sûrement déjà. 

Les livres qui nous font pratiquer l’anglais sans trop nous faire souffrir

Pas de doute, sauf à avoir passé les 15 dernières années dans une grotte, vous connaissez tous déjà Harry Potter de J.K. Rowling. Cette fabuleuse saga était bien sûr également éligible dans la catégorie précédente. Si j’en parle seulement maintenant, c’est justement parce que pour ceux qui ont lu les livres et/ou vu les films, il y a une manière très utile de redécouvrir cette saga : la lire en anglais ! Personnellement, je l’ai fait à la sortie des derniers tomes, trop impatiente de connaître la suite pour attendre la parution en français. Première bonne nouvelle : c’est tout à fait lisible, surtout si vous connaissez déjà la trame générale de l’histoire. Seconde bonne nouvelle : c’est vraiment rigolo de découvrir les noms des personnages en version anglaise, qui sont souvent des traductions littérales : Neville Longbottom par exemple. Vous verrez, très vite, vous lirez en anglais avec aisance et c’est une belle récompense.

Idem avec la foisonnante littérature de Danielle Steel : vous allez me dire « Mais ce sont des
romans à l’eau de rose !? » Et vous aurez raison. En fait, c’est justement idée ! Roman à l’eau de rose veut dire : vocabulaire et scènes souvent répétitives, très vite mielleuses et exaspérantes dans notre langue natale, mais définitivement très utiles dans une langue étrangère ! Je vous parie que vous vous surprendrez même à verser une petite larme lorsque vous arriverez au bout de votre premier roman : sentimentalisme ou soulagement d’en avoir terminé ? A vous de me le dire ! Voici quelques exemples de titres que j’ai lu en anglais et qui fonctionnent bien : First sight, A perfect life, Amazing Grace 

Les romans tellement géniaux qu’on voudrait qu’ils ne finissent jamais

Il y a des écrivains qui sont des génies, personne n’en doute. Par exemple, Jules Verne est quasiment incontesté. J’ai préféré identifier ceux qui sont, certes, lus et connus, mais pas autant que d’autres, alors qu’ils me paraissent tout aussi doués. Je pense d’abord à Robert Merle, qui a écrit de magnifiques romans : Un animal doué de raison en premier chef, qui raconte l’histoire absolument incroyable de l’utilisation militaire des dauphins pendant la Seconde guerre mondiale et qui démontre, s’il le fallait encore, leur incroyable degré d’intelligence rationnelle et émotionnelle.

peter-heller-la-constellation-du-chien-240x385De la même manière, Malevil (également de Robert Merle) est un roman d’anticipation
magnifique, qui fait le lien avec le prochain livre de ma sélection : La constellation du chien de Peter Heller. Dans l’un comme dans l’autre, l’histoire débute après une catastrophe mondiale, qui a fait peu de survivants. L’heure est venue d’apprendre à survivre pour les héros de ces romans, tous deux écrits avec un grand sens du rythme et de l’intrigue. Malheureusement, il semble que le second roman de Peter Heller ne soit pas de la même qualité… Vous l’avez lu ?

Enfin, je ne pouvais pas boucler cette liste sans évoquer mon auteure emblématique : Amélie Nothomb. Je le dis en demi-teinte, car j’ai arrêté de lire ses romans depuis plusieurs années, déçue que j’étais par Le fait du prince (c’est le dernier que j’ai lu) et les quelques précédents. Pour autant, je reste absolument fan de ses premiers ouvrages, avec un vrai coup de cœur pour La métaphysique des tubes, livre qui raconte sa petite enfance au Japon, mais aussi pour Péplum ou encore Les Catilinaires. Ces 3 ouvrages ont le point commun de partir de postulats tout à fait étranges et inhabituels, pour nous amener là où l’auteure le souhaite. Je ne retrouve pas cela dans ses romans les plus récents et c’est dommage.

Les livres qui nous aident à comprendre le monde et à évoluer

Cette dernière catégorie vous donne des clés pour être un véritable acteur dans votre écosystème. Le choix des ouvrages présentés ici a été fait pour l’absence de dogmatisme qui les sous-tend : ces livres sont avant tout des outils de réflexion et d’enrichissement personnel, ils n’ont pas vocation à prêcher pour une quelconque paroisse. Et ça me plaît assez.

Pour aller du général au particulier, je commencerais par le magnifique livre Les identités meutrières d’Amin Maalouf. Vous connaissez déjà son neveu (le trompettiste Ibrahim Maalouf), mais pas encore le tonton ? Outre le fait que l’un de ses romans ait remporté le prix Goncourt (Le Rocher de Tanios), ce qui en dit long sur la qualité de sa plume, mais qui peut aussi en rebuter certains… Amin Maalouf a, de mon point de vue, la grande vertu de l’humilité : celle du grand voyageur, de l’homme multi-culturel, qui a fortement ressenti le déracinement et le racisme ordinaire. Il en tire la substantifique moelle dans Les identités meutrières, ouvrage dans lequel il décortique les mécanismes de la méfiance et parfois de la haine née du communautarisme, tout en mettant en évidence les schémas qui nous permettraient de voir d’abord nos points communs avant d’exacerber nos différences. Si chaque adolescent lisait ce livre durant sa scolarité, nous aurions déjà résolu une partie du problème.

Dans un autre registre, nous avons parfois besoin de méthode, de déclic, d’exercices… pour passer à l’acte. Si vous êtes à la recherche de formules magiques pour vous dépasser, en fait pas magiques du tout mais souvent basées sur des mécanismes de programmation neurolinguistique, le livre Switch, osez le changement de Chip & Dan Heath pourrait bien vous séduire : à grand renfort d’expérimentations et de cas pratiques, les deux auteurs vous expliquent comment vous motiver et motiver les autres, que ce soit au boulot ou à la maison. Testé et approuvé.

Enfin, si vous vous sentez parfois un peu seul dans vos démarches et que vous avez la dupinsensation que vos idées prennent le chemin d’élucubrations utopiques… Les défricheurs d’Eric Dupin pourrait bien vous rebooster durablement : ce livre résolument positif donne un aperçu des nombreuses initiatives conduites partout en France par des citoyens impliqués. Loin de lister des projets de doux-dingues marginaux, ce livre se fait le porte-voix de projets qui pourraient bien essaimer, après avoir fait la preuve de leur pertinence et de leur pérennité. L’esprit est proche de celui du film Demain, succès fulgurant dans nos salles obscures. Il est également cousin de celui du magazine Kaizen, dont le slogan est « Construire un autre monde… pas à pas ». Enfin, il rejoint l’idée fondatrice du mouvement citoyen lancé par Alexandre Jardin, Bleu-blanc-zèbre, qui tente de faire l’inventaire des projets qui marchent pour que les « faizeux » échangent, se soutiennent, collaborent, dupliquent…

Evidemment, cette liste volontairement réduite est très incomplète. J’ai dû faire des choix pour m’arrêter à 10 (en fait, pour ceux qui auraient recompté, il y en a un peu plus…).

Vous l’aurez compris, chacun de ces livres a tenu un rôle très précis dans ma vie : certains m’ont simplement été utiles ou m’ont divertie, quand d’autres m’ont réellement remuée et fait réfléchir. J’espère que ce dossier vous aura donné l’envie d’entendre d’autres musiques, de partir à la rencontre d’autres visions de notre monde, de réinventer un imaginaire… et qu’il vous aura rappelé à vos rêveries et à vos envies. Je serais ravie d’échanger avec vous sur vos futurs commentaires de lecture !

Maintenant, c’est à votre tour : quels sont vos livres de chevet ? Quelle que soit la catégorie à laquelle ils appartiennent (et vous en avez peut-être d’autres en tête ?), je suis preneuse ! En effet, je n’ai plus rien à lire en ce moment…

Bonne lecture

Blandine

L’année sabbatique : un harakiri pour ma carrière ?

Prendre une année sabbatique ne s’improvise pas, d’autant qu’ici, nous allons parler avant tout de voyages. Pour que cela en vaille la peine, il faut que cette année (ou plus, ou moins…) s’inscrive dans un projet de vie, l’exploration d’une aspiration profonde, un besoin impérieux de respiration, de prise de recul, d’ailleurs…

Evidemment, selon le moment de la vie auquel on fait ce choix, la finalité n’est pas la même. Alors, pourquoi ? Pourquoi pas ? Décryptons les arguments pour ou contre un tel break.

Après le bac ou ses études

Tout juste libéré des bancs du lycée ou de l’université, le jeune adulte, forcément, a envie de voir le monde. Il faut dire qu’après 15 ans de scolarité (au bas mot) dans le modèle français, on peut légitimement aspirer à prendre des vacances et surtout à découvrir autre chose.

D’abord, c’est l’occasion lorsqu’on vient d’avoir son bac de se poser la question de ce qu’on veut vraiment faire plus tard. Enfin… très bientôt, en fait. Parce qu’il va falloir bosser. Alors, pour ceux qui n’ont pas encore trouvé leur voie, quoi de plus naturel que de se confronter à la vraie vie pour se décider ? Si c’est l’objectif, cela implique alors de passer cette année dans les conditions d’un vrai adulte, et pas celles d’un enfant gâté : tournure que pourrait prendre un tour du monde à l’hôtel payé par papa-maman. Au contraire, l’idée est de se confronter à la vraie vie, celle dans laquelle on doit se trouver un logement, travailler pour payer son billet et ensuite pour casser sa croûte… C’est l’occasion idéale pour valider le premier choix binaire, à savoir : « faire des études ou pas ». En 1 an, on a le temps de savoir si les bancs de l’école nous manquent ou pas. Et de connaître les conséquences de ses choix, et de ce que veut dire chercher du travail puis travailler sans diplôme.

Attention sur ce point à ne pas se fermer l’entrée dans certaines écoles qui ne recrutent qu’en post-bac, et pour qui une année sabbatique va faire mauvais effet sur le CV. Une fois encore, tout dépend comment elle est justifiée, mais elle peut être parfois rédhibitoire.

C’est aussi une opportunité évidente pour parfaire sa fluidité dans une langue étrangère : quoi de mieux qu’une immersion dans un pays pour devenir bilingue ? Surtout si vous y travaillez. Là dessus, ne vous en faites pas : il suffit d’éviter l’écueil fréquent qui consiste à se regrouper entre colocs de la même origine, mais en-dehors de ça, vous êtes sûr de progresser rapidement. Et… comment vous dire ? Pour certains choix professionnels, on peut dire que la maîtrise de l’anglais devient un incontournable absolu, totalement excluant si vous n’avez pas cette compétence. Au vu du faible dynamisme du marché de l’emploi en France, la question mérite d’être posée d’envisager une réelle expatriation pour trouver le job de ses rêves. Et là, le diplôme compte beaucoup moins que la motivation, la débrouillardise, le système D… Donc c’est très ouvert, pourquoi pas vous ?

Enfin, ne sous-estimons pas l’importance des rites initiatiques : comme a pu l’être le service militaire à une époque, l’année sabbatique peut aider certains à devenir adulte… Ou pas. En tant que parents, un tel choix doit être soutenu dès lors qu’il est construit, muri et semble s’inscrire dans une logique (certes propre à votre enfant), tandis qu’il s’agit d’en dissuader un jeune qui risque de s’y perdre. Mais ce n’est pas si facile de savoir si une telle année sera bénéfique ou non, c’est avant tout une histoire de confiance, et on peut avoir perdu confiance en notre ado, alors qu’il sait très bien ce qu’il fait… Bref, bon courage !! De toute façon, ce n’est pas vous parents qui déciderez, au bout du compte. Alors rangez-vous à la position qui vous paraîtra objectivement la plus juste, et accompagnez votre enfant s’il est réellement déterminé.

Dernière alternative à une année sabbatique : le VIE, pour Volontariat International en Entreprise. Lancé depuis déjà quelques années, cette initiative de l’Etat propose aux entreprises qui le souhaitent de recruter facilement et à un coût raisonnable (charges quasi nulles) des jeunes qui voudraient partir travailler à l’étranger pour une période définie. Pour l’avoir expérimenté, c’est une excellente manière de booster son CV et de réaliser des missions passionnantes, quasiment introuvables pour des jeunes en-dehors de ce dispositif. Attention, il faut avoir entre 18 et 28 ans pour être éligible. Plus de renseignements

Quand on est salarié 

Il s’agit de bien cerner ce qu’implique le congé sabbatique d’un point de vue réglementaire pour un salarié.

Le salarié demande un tel congé au moins 3 mois avant la date de son départ, pour une durée de 6 à 11 mois. L’entreprise peut différer ce congé sous certaines conditions, mais rarement le refuser purement et simplement.

Le salaire n’est pas maintenu et le contrat de travail est suspendu, ce qui induit que le salarié peut choisir d’exercer une autre activité professionnelle durant son congé, sous réserve de loyauté vis-à-vis de son employeur initial.

signatureAttention, pour bénéficier d’un tel congé, le salarié doit justifier de 3 ans d’ancienneté dans la même entreprise, et de 6 ans d’expérience professionnelle, et ne pas avoir déjà profité d’un congé sabbatique, d’un congé pour création d’entreprise ou d’un congé de formation d’au moins 6 mois durant les 6 dernières années. A l’inverse, il est tout à fait possible de prendre un congé sabbatique puis de demander un congé pour création d’entreprise, l’ordre de vos démarches a donc de lourdes conséquences ! A défaut de respecter ces conditions, tout salarié peut demander un « simple » congé sans solde, qui pourra être refusé par l’entreprise sans justification. Notons que l’équivalent du congé sabbatique dans la fonction publique est la mise en disponibilité, mais ses conditions sont très différentes (beaucoup plus souples). En savoir plus

Par ailleurs, le relationnel préexistant avec l’employeur et la période à laquelle le congé sera demandé va bien entendu conditionner l’ambiance du retour dans l’entreprise : Vous partez en plein milieu d’un projet stratégique dans lequel vous jouez un rôle clé ? Vous venez de prendre deux congés maternité dans les 2 années précédentes et vous enchaînez avec un congé sabbatique ? Vous voulez faire payer je ne sais quelle petitesse à votre manager ? Attendez-vous à un retour glacial… Vous êtes sûr de vouloir procéder de cette façon ? Rappelez-vous que vous pouvez tout simplement faire le choix de démissionner ou de négocier votre départ. C’est parfois plus juste pour l’entreprise, et plus clair pour vous également. Il n’y a pas de retour, au moins vous savez où vous en êtes. De toute façon, ne vous attendez pas à pouvoir vous inscrire simplement à Pôle Emploi après une année sabbatique qui se conclut par un départ de l’entreprise : c’est un peu logique, non, quand on y réfléchit ?

Bon à savoir : Si vous êtes chômeur indemnisé au moment où vous décidez de prendre ce congé sabbatique, vous avez la possibilité, plutôt que d’abuser de votre droit à indemnisation, de suspendre les versements durant votre voyage et de les réactiver à votre retour (il suffit pour cela de mentionner dans votre déclaration avant de partir que vous n’êtes plus à la recherche d’un emploi).

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Pour le coup, je n’ai pas pris d’année sabbatique complète en tant que salariée, mais je suis tout de même partie 3 mois continus pour faire un grand voyage en famille en Nouvelle-Zélande et en Australie, en utilisant un congé sans solde. Quel était notre objectif ? Que notre fils entre à l’école avec les yeux grands ouverts sur le monde, familier avec une langue étrangère et curieux, dégourdi, sociable… Pari gagné, avec en prime de beaux moments passés tous les 3 et des souvenirs réellement inoubliables, à donner le biberon à un bébé kangourou, à regrouper un troupeau à dos de cheval, à contempler des couchers de soleil plus grandioses les uns que les autres, à nager au beau milieu de la barrière de corail…

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Fait au bon moment, cette petite aventure n’a eu aucun impact direct sur ma carrière, hormis le fait de voir les choses autrement et donc de me poser ensuite beaucoup plus de questions sur mes choix… Allez savoir si c’est à ce moment que mon envie de me tourner vers l’entrepreneuriat a germé ?

En tant qu’indépendant

Que ce soit en tant que salarié ou indépendant, la conséquence financière immédiate est a priori la même : pas de revenus durant la durée du congé sabbatique. Voyez tout de même comment limiter vos dépenses ou générer de nouvelles sources de revenus pendant votre voyage, par exemple en louant votre appartement en votre absence. Dans ce même esprit, certains se créent une cagnotte en amont de leur voyage en proposant de rendre différents services contre un petit quelque chose. C’est le cas d’Elsa et Quentin qui préparent un tour du monde pour 2017.

Pour un indépendant, la décision de partir est plus personnelle et vous aurez plus de liberté pour la prendre, mais cela n’empêche que le timing aura toute son importance pour la suite de votre activité professionnelle : si vous venez de répondre à 10 devis et que vous plantez tous les projets du fait de votre départ, votre réputation risque d’en pâtir… et dans ce sens-là, les gens n’auront pas oublié à votre retour !!

Idée n°1 : Préparez votre reprise en contactant en amont vos partenaires professionnels habituels pour vous rappeler à leur bon souvenir. Vous le savez mieux que personne, les contrats ne tombent pas du jour au lendemain, donc il faut anticiper ! Enfin, sauf si vous avez 6 mois de marge une fois revenu pour gagner à nouveau votre vie… Pour certaines professions, il est même souhaitable de continuer à travailler à distance sur certains petits contrats (lorsque c’est faisable évidemment, je pense par exemple à des graphistes). Ainsi, personne n’aura même eu le temps de s’apercevoir de votre absence.

Idée n°2 : Associez-vous avant de partir. Votre nouvel associé sera ravi de voir votre volume d’affaires lui revenir pendant votre congé, et à votre retour, vous aurez plus de facilités à vous remettre le pied à l’étrier puisqu’il aura entretenu votre réseau. Encore faut-il trouver quelqu’un de confiance, qui va faire du bon travail et ne pas vous mettre à la porte en cours de route !

Idée ultime : Utilisez votre voyage comme un outil professionnel. Certes, il faut avoir envie de le faire, mais cela peut donner une nouvelle dimension à votre carrière si vous en faites une opportunité pour trouver de nouvelles idées ailleurs, pour pivoter, pour trouver un ou plusieurs associés, pour changer de vie, pour faire le buzz dans votre domaine d’activité… Imaginez un menuisier qui au bout d’un an, pourrait présenter le book de ses créations aux 4 coins du monde ?

Pour un retraité

L’avantage quand on est retraité, c’est qu’on ne risque plus grand chose pour sa carrière !!

Par contre, on peut se poser la question d’être toujours en vadrouille, surtout lorsqu’on a une flopée de petits-enfants qui ont besoin d’une nounou le mercredi, pendant les vacances… Il faut donc faire des choix, encore ! Ou pas… Partir 6 mois par an durant les tristes mois d’hiver pour confirmer le bon vieil héliotropisme des sexagénaires et profiter de sa tribu l’été, est-ce que ça ne serait pas ça, le bonheur ?

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Certains vont jusqu’à émigrer pour leurs vieux jours dans des pays plus ou moins exotiques. Attention alors à bien vous entourer ! Le soleil oui, mais isolés de vos amis et de votre famille, il fera grise mine… Alors pourquoi ne pas envisager l’habitat collectif, pour partager un projet trans-générationnel avec d’autres familles dont la manière de vivre pourrait rejoindre la vôtre ? Mais c’est une autre histoire…

Conclusion

Partir oui, mais dans de bonnes conditions et pour les bonnes raisons !

Autre question que nous n’avons pas abordé : l’année sabbatique doit-elle être une introspection, en solitaire, ou être partagée, en couple, en famille, entre amis… ? Pas de réponse toute faite, mais posez-vous bien la question de vos objectifs et de vos envies avant de partir. Et laissez-vous le droit de changer d’avis en cours de route, au fil des rencontres, des concours de circonstances et des facéties du destin.

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Je pense ici à un ami, Pilou, qui, parti à plusieurs pour un tour du monde à la voile, a finalement continué sa route seul, mais ouvert aux autres, se transformant par exemple pour quelques temps en instituteur à Madagascar au détour d’une conversation sur un bateau quelque part au sud du continent africain. Découvrir ses photos

D’ailleurs, nous n’avons pas parlé d’humanitaire. Ca vous démange ? Pour un vrai dépaysement, du sens et du sérieux, vous pouvez notamment vous tourner vers Envol Vert, association que je suis et soutiens depuis plusieurs années, et qui œuvre à la fois en France et en Amérique Latine. En savoir plus

Ne vous trompez pas non plus entre grand et petit voyage. Parfois, le voyage intérieur sera très fort sans avoir besoin de traverser des océans. Il suffit pour cela de lire le récit des pèlerins de Compostelle ou de certaines philosophes marcheurs comme Axel Kahn. La destination et le chemin qui y conduit ont donc toute leur importance.

Espérons en tout cas que vous vous laisserez porter et que vous reviendrez changé, différent, mais plus proche de votre nature profonde. Prêt à jeter l’ancre ou à repartir.

Les 10 plaies de l’entrepreneur en France

Voilà un peu plus d’un an que j’ai créé mon entreprise. C’est le moment de faire le point sur ce parcours du combattant qu’est la création d’entreprise en France.

Oui, ça pourrait être encore pire, et certaines procédures se sont considérablement simplifiées, c’est vrai. Mais il faut être honnête : il y a encore du travail pour que les informations à disposition soient fiables, à jour et cohérentes, et encore un monde pour que chaque étape soit réellement optimisée, pour ne même pas parler de la dématérialisation des flux.

C’est aussi une question d’état d’esprit. Je cite l’un de mes interlocuteurs pendant ces étapes de création : « Il ne manquerait plus que ce soit facile ! ». C’est vrai, on a signé pour en chier…

Alors, j’ai décidé de partager avec vous quelques moments croustillants de ces épreuves, parfois pathétiques, qui j’espère, aideront aussi les aspirants-créateurs dans leurs démarches : retrouvez chaque semaine un nouvel épisode pendant tout l’été.

Chapitre 1 – Financer son projet

Lors d’une création d’entreprise, l’un des principaux sujets est celui du financement. Quelle que soit la forme juridique retenue, il ne faut pas se leurrer : un apport financier minimum est souvent requis, pas seulement pour régler les formalités de création, mais surtout pour assurer le démarrage de l’activité : matériel, achats, publicité… et salaire ! Vous ne pourrez sûrement pas dégager suffisamment d’argent de votre activité dès les premiers mois pour vous rémunérer, et c’est pourquoi vous aurez besoin d’un fonds de roulement, qu’il faut financer.

Bien sûr, il y a les banques pour ça. Mais financer de l’immatériel n’est pas évident, car les banques n’y trouvent pas les mêmes garanties qu’avec un bel immeuble hypothéqué… Souvent, il va donc falloir trouver des sources de financement complémentaires. Ces dernières vont d’ailleurs aussi constituer des éléments positifs pour le dossier bancaire et fournir un effet de levier.

Les prêts d’honneur

J’ai réalisé 2 dossiers, qui se sont tous les 2 soldés par un échec.

Le premier, avec la Maison de l’Emploi et de l’Entreprise. Après avoir attendu plus de 2 mois pour être reçue après de nombreuses relances, j’ai fini par rencontrer un interlocuteur arrivé avec une heure de retard de son déjeuner, qui avait oublié notre RDV, n’avait absolument pas étudié mon projet, et m’a appris le jour dit que je devais constituer un dossier de 20 pages. Dommage de me le dire seulement maintenant, alors que j’avais pris la peine de lui demander de quels éléments il avait besoin la semaine précédente (il m’avait alors répondu qu’un business plan suffisait). Bref, premier RDV en pure perte. J’ai renvoyé mon dossier dans la foulée, en version électronique et papier et attendu, relancé, attendu, relancé, attendu… Le même personnage m’a clairement demandé d’arrêter de le relancer, puisqu’a priori mon dossier était complet (sic) et que je serai contactée pour une date de passage en commission. Commission qui n’a finalement jamais eu lieu, puisque l’organisme a fermé ses portes quelques mois après et n’a pas été remplacé sur le territoire durant la période à laquelle je cherchais des financements. Je l’ai appris par hasard, durant un événement de la CCI.

Le second dossier était pour l’AFACE, autrement dit France Initiatives. Je n’avais pas sollicité cet organisme initialement, car j’avais identifié que l’un des critères était de créer au minimum 3 emplois sur 3 ans, ce qui n’était pas mon cas. Après avoir croisé des personnes de l’AFACE lors d’un salon professionnel, on m’a incitée à déposer néanmoins un dossier, me disant que c’était une question de présentation et de qualité du dossier. J’ai envoyé le dossier, on m’a reçu et on m’a signifié une fin de non recevoir car je ne créais pas 3 emplois sur 3 ans… Dommage, car cet organisme propose un réel soutien à certaines entreprises, mais mon projet ne répondait définitivement pas aux critères. Encore du temps perdu pour tout le monde.

Mon dossier n’était pas éligible aux autres organismes que j’ai identifié : âge, lieu d’implantation, secteur d’activité, forme juridique… Il y avait toujours quelque chose qui clochait.

Alors comment vous dire ? Les prêts d’honneur, il ne faut pas miser tout son business plan dessus…

Les business angels

J’ai reçu à peu près à la même période, une invitation de mon ancienne école à participer à un concours de pitchs, face à un jury de « business angels ». Autrement dit, des personnes qui ont de l’argent à investir dans des entreprises à fort potentiel.

Je complète le dossier, je l’envoie, mon projet est retenu parmi ceux qui pourront « pitcher ».

Arrivée sur place avec un peu d’avance, j’en profite pour échanger avec d’autres porteurs de projet, la plupart encore étudiants dans l’école en question. Je m’aperçois qu’ils se connaissent tous, ainsi que les membres du jury, constitué d’un professeur de l’école, d’un polémiste économique et d’un jeune start-upper (a priori) connu.

Après 3 heures à attendre mon tour, car tous les étudiants ont une bonne raison de passer avant moi qui n’ait rien d’autre à faire de ma journée, je commence mon pitch après que le jury m’ait annoncé qu’ils n’étaient pas vraiment à cheval sur le temps de présentation étant donné le retard déjà pris : je ne suis donc pas obligée de respecter les 7 minutes initialement définies. OK. Je m’exécute, et au bout de 7 minutes, je me fais couper : en fait si, c’était important de respecter les 7 minutes. Et puis surtout, ils se sont presque endormis : je n’ai pas dansé sur la table, pas diffusé de vidéo, même pas distribué d’échantillon, j’ai juste expliqué mon projet avec le support d’un PowerPoint qui venait appuyer mes propos en images (photos, croquis, esquisse de logo, chiffres clés). Bref, je suis une grosse naze, et en plus je manque vraiment trop d’ambition pour les intéresser : pas de déploiement national prévu en année 1, ni de développement international en année 2. Je ne demande que 20.000€. Bref, je crains. Aurevoir.

A posteriori, c’est vrai, je me suis rendue compte qu’un « petit » projet de coworking rural était clairement hors cible pour des business angels. Dommage tout de même que mon dossier n’ait pas été filtré à la première étape, ça aurait permis à tout le monde de ne pas perdre son temps.

Le crowdfunding

Puisque mon projet était à vocation collaborative, quoi de plus logique que de faire appel à des donateurs privés, en mode collaboratif ?

J’ai lancé une campagne quelques semaines après l’ouverture du lieu pour financer les derniers aménagements. Plus qu’une source de financement, il faut voir le crowdfunding comme un outil de communication qui crée le buzz autour du projet. Certes, j’ai récolté un peu d’argent, mais pour dire vrai, j’ai dû mettre au pot avant la fin de la campagne pour qu’elle aille au bout (une campagne qui n’atteint pas son objectif voit sa jauge retomber à zéro). Il semblerait que je sois loin d’être la seule. Et étant donné que les principales plateformes de crowdfunding prennent une commission de 8%, le gain net se réduit comme peau de chagrin. Mais ne crachons pas dans la soupe, c’était une expérience très enrichissante. Très consommatrice de temps, mais néanmoins à bilan positif.

Enfin, pensez aussi aux subventions, dont j’ai moi-même bénéficié pour financer une partie de mes investissements initiaux.

En conclusion : si vous n’avez pas d’apport personnel significatif (ou de « love money », c’est-à-dire de l’argent de vos proches), ça va être compliqué… Pour autant, dès lors que votre projet a une dimension (vraiment) innovante, tout est possible, et les chiffres peuvent vite s’envoler.

Chapitre 2 – Se connecter à Internet

Evidemment, si vous faites partie des chanceux qui créent leur entreprise dans une zone fibrée, la question ne se pose pas… A vrai dire, il est de plus en plus fréquent que ce soit un critère pour s’installer : « Il y a la fibre ? Non ?? Au revoir… ».

Vive la campagne…

Pour ma part, la question ne se posait pas en ces termes, puisque le département des Yvelines est embourbé depuis plusieurs années (à quelques zones urbaines près) dans un embrouillamini juridico-bureaucratique qui nous privera encore de la fibre pendant un certain temps, malgré des annonces enthousiastes et tonitruantes tous les 6 mois.

L’espace choisi ne disposant même pas d’une ligne téléphonique au moment de notre acquisition, je me suis naturellement tournée vers Orange, puisque l’opérateur historique dispose toujours d’un monopole dans ce domaine. Après une étude technique à plus de 300€, j’ai pu faire raccorder une ligne ADSL depuis l’autre bout du bâtiment (déjà équipé), pour la modique somme de 1000€. Je vous passe la rocambolesque visite d’un technicien, qui débarque comme une fleur avec une Livebox pour la brancher alors que la ligne n’a pas été tirée.

Pourquoi faire simple

ADSL, ADSL2+, SDSL, XDSL, satellite, fibre, Mo, switch, routeur, débit symétrique… Pour se connecter à Internet, il faut commencer par se familiariser avec un charabia carrément déprimant.

Partant de loin (ADSL avec un débit suffisamment faible pour ne pas pouvoir regarder une vidéo sur Youtube), j’ai donc dû trouver des palliatifs. J’ai envisagé toutes les options pour augmenter les performances de débit Internet. J’ai rapidement exclu le satellite, puisque ceux qui avaient testé cette option dans la région m’ont raconté des débits très aléatoires, remis en cause au moindre coup de vent ou durant une journée nuageuse, et on peut dire que notre territoire n’est pas épargné en la matière.

Capture d’écran 2016-07-18 à 12.05.23J’ai également interrogé à nouveau Orange, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ne m’ont pas aidée : j’ai obtenu une réponse différente par interlocuteur, qu’il soit question de possibilités techniques ou de prix ; sans compter le nombre d’agents qui ont soi-disant transmis ma demande, mais après quoi je n’ai jamais été rappelée ; les allers-retours entre le service pro et le service entreprises, qui visiblement n’ont rien à voir => je cite une opératrice Orange : « Mais Madame, il faut un chiffre d’affaires minimum, pour accéder aux offres Entreprise… » Ah oui ? Mais je viens de créer mon entreprise… Et ce chiffre d’affaires minimum est de combien ? « Je ne peux pas vous le dire en ces termes, c’est plus compliqué que ça » Je n’en doute pas… ; et enfin, une proposition de connexion SDSL à plus de 400€ d’abonnement mensuel pour un débit encore très insuffisant de 4 Mbits affichés (le schéma joint correspond à notre débit réel aujourd’hui : ADSL + SDSL).

Le bout du tunnel

J’ai fini par faire appel à un « courtier » en opérateurs télécoms, qui a interagi à ma place avec eux et négocié un tarif. Très concrètement, il a obtenu exactement le même abonnement que celui qu’Orange m’avait proposé en direct, toujours chez Orange, mais… pour 130€ par mois (soit un prix divisé par 3).
Cela reste très cher par rapport à la performance proposée, mais je n’avais pas d’autre choix.

Vivement la fibre, donc… Reste à savoir à quel tarif ? Sur Rambouillet Territoires, il semblerait que les entreprises bénéficient d’un abonnement à moins de 100€ mensuels, tandis qu’on parle de 1000€ par mois au bas mot pour les territoires ruraux qui seront déployés… C’est ça, l’égalité des territoires ?

Chapitre 3 – Commander et recevoir du mobilier et de l’équipement

Etape 1 : l’inspiration

imageJe passe rapidement sur la phase de recherche dudit mobilier et équipement, qui est très sympa à réaliser. De mon côté, j’ai commencé par me créer un carnet d’inspirations dans lequel j’ai compilé toutes les ambiances qui me plaisaient sur des magazines, Pinterest, des lieux visités… J’ai ensuite passé tout ça en revue et regardé quels styles émergaient principalement, puis j’ai fait mon choix sur 2 styles majeurs, que j’ai associé chacun à une zone de l’espace.

Etape 2 : le rapport qualité/prix

J’ai fureté sur le net à la recherche de bons plans pour reconstituer ces ambiances à des prix raisonnables.

J’ai vite identifié quelques enseignes. J’ai juste regretté que le site d’Ikéa soit si mal conçu : on trouve des milliers de choses en magasin, mais sur le site, c’est plus rare…

Etape 3 : la commande

IMG_0048Je me suis déplacée en magasins pour commander. Grand bien m’en a pris, car la plupart des grandes enseignes proposent des remises aux entreprises, il suffit de présenter un K-bis. Pour certaines, la remise est conditionnée au volume d’achats, mais ce dernier est vite atteint pour l’aménagement complet d’un espace de coworking… J’ai aussi eu la bonne surprise qu’un vendeur m’annonce que je devrais encore patienter 2 petites journées avant de commander, car une opération -20% sur tout le magasin allait s’ouvrir… Sympa !

Etape 4 : la livraison – Arghhhhhhh !

C’est là que ça se corse, avec la livraison… D’abord, certaines livraisons sont arrivées en avance, en retard, avec des éléments abîmés ou manquants… Mais la palme revient très largement à Alinéa. En résumé, j’ai passé 3 fois la même commande, pour finalement l’annuler et aller la récupérer moi-même en magasin.

livraison

Explications… Dans le cadre d’une commande de plusieurs produits simultanément (ce qui arrive tout de même assez souvent, non ?), le temps que la commande soit traitée par le centre logistique, il arrive (fréquemment) que l’un des produits ne soit plus disponible, totalement ou partiellement. Plutôt que d’envoyer la commande partiellement, ou une alerte au service de suivi des commandes ou au client… Il ne se passe rien, et la commande est bloquée, mais sans que qui que ce soit n’en soit informé. La première fois, j’ai donc attendu, crédule, que la date de livraison soit passée, pour m’inquiéter de sa non-livraison. Grâce à mon appel, Alinéa s’est rendu compte de la mise en attente de ma commande (je parle tout de même d’une commande de plus de 3200€…). Elle l’a relancée, mais pas de chance, un autre produit s’est retrouvé en rupture de stock avant l’expédition… Puis, rebelote une troisième fois !! Ce petit jeu a duré plus de 3 mois. Avant que j’abandonne et aille moi-même récupérer mes produits en magasin (pour ceux qui n’étaient pas en rupture, évidemment…).

Conclusion

Quelque soit votre secteur d’activité, le processus de suivi de commande et de logistique est primordial pour la satisfaction de vos clients. Personnellement, j’ai black-listé plusieurs enseignes après cet aménagement, et je leur fais aussi de la pub.

Chapitre 4 – Gérer le RSI, les cotisations sociales & la mutuelle

Le RSI

Tous les indépendants connaissent le RSI de réputation, avant même d’y avoir eu affaire. Certains choisissent même leur forme juridique en fonction de ça, optant pour le régime de la SASU, qui leur permet d’y échapper ! Un comble, non ?

J’ai été joueuse, et j’ai créé une SARL unipersonnelle, avec rattachement automatique au RSI, donc. Franchement, je m’attendais à pire ; en 1 an, je n’ai eu droit qu’à 2 bourdes. C’est un quota acceptable, non ?

RSI-LOGO2La première : je décide, voyant que tout se passe bien, de passer du paiement par chèque à celui par prélèvement. J’envoie le mandat SEPA, évidemment en amont de la date d’échéance de mon paiement. Sauf que… 2 mois plus tard, je reçois une relance pour non-paiement, incluant une majoration. J’appelle le RSI : c’est normal, le traitement des mandats reçus est plus ou moins long, et là… Il n’a pas été traité avant la date d’échéance, donc forcément, j’ai eu une majoration. Je peux demander une remise gracieuse. Ce que je fais en renvoyant mon chèque de règlement, hors majoration. Sauf que lors du prélèvement suivant, la majoration est prélevée aussi… Il faut que je rappelle…

Deuxième bourde, j’avais reçu un échéancier prévisionnel pour mes cotisations de 2016 fin 2015, mais nécessairement faux, puisque basé sur une rémunération estimée, très supérieure à ma rémunération réelle. Constatant mes déclarations de rémunération réelle sur 2015, le RSI me renvoie début 2016 un nouvel échéancier ajusté, avec des montants bien inférieurs. Sauf que… les prélèvements sont réalisés sur la base de l’échéancier prévisionnel de 2015 ! Heureusement que j’avais un peu de trésorerie sur mon compte, sinon c’est un coup à finir avec des agios à payer. Il faut que je rappelle…

Les cotisations sociales

Côté cotisations sociales aussi, c’est assez rigolo : j’ai reçu juste après la création de mon entreprise un appel de fonds de Malakoff-Médéric, organisme de rattachement obligatoire pour mon activité, pour mes salariés. Que dis-je, un appel de fonds ? Une mise en demeure par lettre recommandée ! Sauf que je n’avais pas de salarié. Mais une somme significative à payer, là encore, estimée. Après les avoir contactés, c’était une erreur informatique. Oups.

La mutuelle pour les indépendants

mutuelleLà où je peux faire ce que je veux, c’est pour ma mutuelle à moi, travailleur non salarié. J’ai donc décidé de faire un choix radical : ayant des besoins de santé au quotidien assez limités au sein de notre famille, nous avons opté pour une mutuelle qui couvre très bien les frais d’hospitalisation et de longue maladie (on ne sait jamais), mais nous ne sommes remboursés pour rien d’autre. Ainsi, une consultation chez le médecin nous coûte 23€, chez un spécialiste 60€… et une paire de lunettes environ 300€. OK, à l’année, on dépense autour de 1000€ pour nous 3. Sauf qu’en face… au lieu de dépenser autour de 150€ mensuels (pour un remboursement qui reste partiel), elle nous coûte 30€ en tout. Faites le calcul…

Chapitre 5 : Embaucher son premier salarié

Contrat de travail contrat

Il paraît que les modalités d’embauche ont été simplifiées en France. Je n’ose imaginer ce que c’était avant… D’autant que j’ai choisi un format simplifié : le TESE. Kesako ? Il s’agit de l’équivalent du CESU, pour les entreprises. En gros, des chèques emploi-service, réservés à la réalisation de certaines tâches, en l’occurrence du ménage.

Convention collective

L’étape de déclaration unique d’embauche est assez conceptuelle : vous devez savoir quelle médecine du travail, quel organisme de retraite, quel taux d’accident du travail… sont applicables à votre activité. Vous le savez, vous ? Quelle est la convention collective du coworking ? … Bref, j’avoue, j’ai fait plouf, plouf. Et ensuite, j’ai corrigé au fil de l’eau, et de mes échanges avec l’URSSAF, qui n’a pas manqué de revenir vers moi pour obtenir des explications, surtout quand je leur ai dit que je faisais du « coworking », justement. Ca a été rigolo pour estimer le taux d’accident du travail.

Chapitre 6 : Gérer ses salariés

URSSAF

Là encore, je vous passe différentes étapes, par exemple la lettre de radiation reçue par l’URSSAF, mais c’est normal, parce qu’il paraît que le TESE est traité à part.

Aide à la première embauche

Mais je vais m’attarder sur le dossier d’aide à la première embauche, aide à laquelle j’étais éligible suite au recrutement de ma femme de ménage, certes pour 4 heures par semaine, en CDI. J’ai commencé par chercher le dossier sur Internet. Dossier papier que j’ai imprimé, ainsi que tous les justificatifs demandés, et envoyés. Quelques semaines se passent et je reçois le dossier en retour, avec une note indiquant qu’il manque le contrat de travail. Sauf que : qui dit TESE, dit déclaration préalable à l’embauche, mais pas de contrat de travail… Donc ? Je les appelle ! Ma première interlocutrice n’a jamais entendu parler du TESE, elle me passe sa responsable. Qui elle, après m’avoir tout de même fait épeler l’acronyme, me dit avoir compris le problème. Il faut que je lui renvoie le dossier, en indiquant bien qu’il lui est destiné à elle et personne d’autre et pour cela, elle me dit d’apposer « Personnel » sur l’enveloppe. Quelques semaines se passent à nouveau, et je reçois le sésame : la validation de ma pré-inscription au dispositif. Mais pourquoi « pré » ? Et bien parce que maintenant, je dois remplir les mêmes informations sur la plateforme Internet pour laquelle j’ai reçu des codes d’accès. Je remplis, je valide… Et là : « Merci pour votre inscription, vous devez maintenant imprimer l’ensemble du dossier et le renvoyer à l’adresse indiquée ». Ah d’accord, c’est un canular. Non, pas du tout. J’ai arrêté de compter les frais de timbre et le temps passé. Par moi et les services de l’Etat. Finalement, mon dossier a bien été validé. Je touche mensuellement environ 20€ d’aide, qui nécessite, outre les démarches initiales, de compléter chaque mois une déclaration en ligne et d’envoyer les pièces justificatives par courrier. Stop ou encore ??

Mutuelle

Enfin, il y a l’histoire de la mutuelle pour tous. Belle et noble idée. Sauf que pour une TPE comme moi, qui ai, je le rappelle, simplement embauché une femme de ménage 4 heures par semaine, ça tourne au cauchemar. En effet, toute entreprise ayant des salariés doit, depuis janvier 2016, disposer d’un dispositif de mutuelle, pour ses salariés cadres et non cadres. Ma femme de ménage ne souhaitait pas bénéficier de cette mutuelle, puisque son mari en a déjà une, qui couvre l’ensemble des membres de la famille. Cas de dispense autorisé. Sauf que… il faut quand même mettre en place le dispositif, même si aucun salarié n’est intéressé. J’ai donc sollicité une mutuelle, qui m’a établi les 2 conventions, cadres et non cadres. Evidemment, je ne paie aucune cotisation puisqu’aucun salarié n’en bénéficie. Mais chaque trimestre, je reçois encore une déclaration à compléter, pour confirmer que je n’ai toujours aucun bénéficiaire. Belle efficacité pour tous.

Chapitre 7 : Obtenir un agrément de domiciliation

En tant qu’espace de coworking, j’ai des clients qui s’installent à l’année, et qui veulent domicilier le siège de leur société dans mes locaux. Pour que cela soit possible, il faut obtenir un agrément de domiciliation auprès de la Préfecture, en remplissant un certain nombre de conditions.

domiciliation1Encore un petit dossier… Je joins l’ensemble des pièces justificatives, j’envoie et j’attends. A la date de l’ouverture, je n’ai toujours pas de retour. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ? Là, ça ne marche pas comme ça. Je les rappelle, et mon premier interlocuteur me dit qu’il semblerait que le dossier soit complet, mais il ne sait pas pourquoi il n’est pas passé en validation, il se renseigne… Finalement, il me passe son chef : c’est lui qui me dira qu’il ne manquerait plus que ce soit facile d’obtenir un agrément de domiciliation, non mais ! Il me dema1406104623-administrationnde de lui envoyer des compléments d’information. Par exemple (après réflexion), oui, il y avait bien les plans du local dans mon envoi précédent, avec les zones légendées, mais il aimerait que les espaces dédiés à la domiciliation soient encadrés en jaune, ce serait quand même plus clair. Idem, il souhaite des photos de l’espace. Non, ce n’est pas demandé dans le dossier sur Internet, mais lui les veut. Finalement, faisant preuve de diligence, j’ai obtenu ma domiciliation dans la foulée.

Depuis, je déclare tous les trimestres la liste des entreprises que je domicilie auprès du Centre des impôts. Je devrai renouveler ma demande d’agrément au bout de 5 ans.

Chapitre 8 : Mener une activité d’organisme de formation

Rien de plus facile que de déclarer son activité d’organisme de formation. Enfin, encore faut-il avoir déniché son premier client ! Et oui, car pour y aspirer, il faut fournir sa première convention de formation. Pas évident sans numéro d’enregistrement… Car la première question que pose un client qui cherche un formateur, c’est : vais-je pouvoir faire prendre en charge cette formation par mon OPCA ?

formation1J’ai réussi à signer ma première convention. J’ai envoyé le dossier. J’ai reçu mon numéro d’enregistrement. Attention, à ne pas confondre avec un numéro d’agrément, car en effet, cette étape ne vaut pas agrément. En résumé, la DIRECCTE, qui octroie ces numéros, ne fait qu’acter de la demande, mais ne valide pas le contenu des formations. Logique, puisqu’on vous demande un extrait de casier judiciaire, mais aucune justification de diplôme ou de compétence attestant de votre qualité de formateur.

Quelques semaines plus tard, j’ai reçu une invitation à une session d’information de la DIRECCTE. Une journée entière à Aubervilliers plus tard, je m’aperçois que les formalités associées à la formation sont extrêmement complexes, et pour certaines, assez étonnantes : si évidemment, il faut une convention de formation et une feuille d’émargement signée par les stagiaires (normal), il faut aussi leur faire signer un règlement intérieur. Bizarre, je ne me souviens pas avoir signé ce type de documents lorsque j’ai été formée en entreprise. Il faut également réaliser une comptabilité spécifique de cette activité de formation au sein des autres activités de l’entreprise. Les revenus, mais aussi les charges. Cela revient à éclater chaque poste : loyer, charges courantes… Pourquoi ? Parce que lors de ses contrôles, la DIRECCTE peut décréter que certaines charges sont excessives et donc requalifier la formation et refuser sa prise en charge. C’est de l’argent public. Pour autant, l’organisme de formation fixe librement ses tarifs : on peut donc pratiquer des prix exorbitants, dès lors qu’on ne met pas de dépenses excessives en face. Enfin, il faut réaliser un rapport pédagogique et financier annuel, avec un éclatement des stagiaires par typologie de client, à des fins statistiques. Encore de la paperasse…

Et sachez qu’en tant qu’organisme de formation, il nous est interdit de rentrer en contact directement avec les OPCA, organismes à qui les entreprises versent les budgets de formation. Il y aurait conflit d’intérêt. Alors comment se faire référencer dans leurs catalogues de formation ? Ce sont les OPCA qui sont censées prendre contact avec nous. Autant vous dire qu’à part si vous vous appelez Acadomia ou si vous connaissez quelqu’un dans une OPCA, vous pouvez toujours attendre… C’est vrai aussi que c’est nettement plus simple de laisser le client se dépêtrer des démarches seul. C’est ce qui arrive à l’un de mes clients actuels, à qui on demande de renvoyer des informations que j’ai déjà fournies par son intermédiaire, mais qui ne semblent pas convenir, sauf que je ne peux pas régler ça directement avec l’OPCA. Question de principe. Et dans l’administration française, on ne revient pas sur un principe.

Chapitre 9 : Tenir sa comptabilité et déposer ses comptes annuels

La comptabilité, j’en ai fait en école de commerce. Débit, crédit, bilan, compte de résultat… Je me suis replongée dans ce monde lorsque j’ai réalisé mon business plan.

Mais c’est une autre paire de manches lorsqu’il s’agit de réaliser toute la saisie comptable de son activité ! Aujourd’hui, je n’ai pas les moyens de payer chaque mois un cabinet pour faire ce travail à ma place. J’ai tout juste de quoi payer un expert-comptable qui certifie mes comptes annuellement.

Alors, j’ai découvert les joies de la comptabilité.

comptaD’abord, le choix du logiciel. Concrètement, on m’a dit : Ciel ou EBP. J’ai testé les deux en ligne, je n’ai pas vu de grosses différences, je les ai trouvés aussi peu ergonomiques l’un que l’autre. Des menus dans tous les sens, aucune aide à la saisie, pas de tableau de bord de suivi analytique… J’ai opté pour EBP, la version devis/facture/compta qui permet de déverser automatiquement les factures en comptabilité. Un gain de temps potentiel.

Sauf que… Le logiciel est plein de bugs. Par exemple, tout d’un coup, les numéros de pièces ne s’incrémentent plus automatiquement. Ou encore, certaines saisies sont refusées parce que le compte n’existe pas (sauf qu’il a un numéro qui fait partie de la liste des choix proposés par le logiciel lui-même). Ou enfin, les factures arrêtent de se déverser en comptabilité. Bref, il faut tout vérifier sans arrêt et il n’y a aucune aide à la saisie. La hotline n’intervient qu’en payant un système de consultation.

Et puis bien sûr, il y a le problème de maîtriser suffisamment le mécanisme comptable pour passer certaines écritures non récurrentes : le versement d’une subvention ? l’achat-revente sans commission ?

Pour finir, les déclarations de TVA se font maintenant assez facilement sur Internet. Tant que vous n’avez pas de demande de remboursement de crédit de TVA à faire. Car dans ce cas, on retombe sur cette fâcheuse tendance de remplir le questionnaire en ligne et de se voir demander des pièces qui n’ont rien à voir ensuite par mail ou par courrier. Notons néanmoins que les contrôleurs de l’antenne de Rambouillet sont agréables et réactifs. Un très bon point !

argentAprès un premier exercice de toute beauté, je clos mes comptes avec mon expert-comptable. Il me renvoie les documents de clôture. Je vais les déposer comme une grande avec mes petites mains au greffe du Tribunal de Commerce. Je fais la queue. La dame à l’accueil renvoie dans leurs buts les 3 personnes qui attendent devant moi, tous pour la même raison : il manque les annexes… Mon tour arrive, même sanction : il manque les annexes… Rentrée au bureau, je rappelle mon expert-comptable : en vertu de la loi machin-chose sur la micro-entreprise, les annexes ne sont pas requises. Bref, je renvoie le tout par courrier. Il s’en est fallu de peu pour que j’y arrive du premier coup. Mais maintenant, je suis prête pour l’année prochaine !

Chapitre 10 : Eviter les arnaques, lutter contre la prospection téléphonique intempestive

Toute inscription au Registre du Commerce et des Sociétés a des conséquences fâcheuses : dans les 2 mois qui suivent, vous recevez pléthore de courriers soi-disant officiels, voire même des mises en demeure, de payer, qui l’inscription à un registre ou annuaire, qui les droits d’enregistrement à je ne sais quel organisme…

Bref, une seule règle : lorsque vous recevez ce type de courrier, si vous n’êtes pas certain à 100% d’avoir à régler cette dépense, consultez notre meilleur ami Google. En général, le moteur vous renverra vers un article ou un blog qui explique l’arnaque. Encore du temps perdu, mais mieux vaut vérifier avant de payer.

L’ouverture d’une ligne téléphonique fixe a à peu près le même effet : au bout de quelques semaines, le temps que la ligne soit répertoriée, vous allez recevoir chaque jour une multitude d’appels pour vous vendre un service en ligne, une cuisine, un système de sécurité… Quand ce ne sont pas des enquêtes. Vous avez beau leur dire que téléphonevous n’êtes pas intéressé, que vous travaillez… Il faut juste raccrocher.

Sauf qu’à force d’être sollicité à grande envergure, j’ai fini par répondre à mon téléphone fixe en aboyant, certaine que c’était une énième prospection non désirée. Oups, cette fois c’était un prospect ! Pas bon pour le business. L’un de mes clients a une autre méthode assez sympa : demander à la personne de patienter le temps que vous alliez chercher votre patron… Qui évidemment n’arrive jamais jusqu’au téléphone !

J’ai aussi reçu des messages vocaux enregistrés qui peuvent vraiment prêter à confusion lorsqu’on a le profil ciblé : « Dans le cadre de votre recherche d’emploi, nous avons trouvé une offre qui correspond à votre demande. Merci de rappeler le numéro 08xx… ».

Alors j’ai essayé une solution toute neuve : s’inscrire sur Bloctel. Après une période de mise à jour des bases de données, les appels ont quasiment cessé, c’est très efficace (le premier mois) ! Voilà une belle initiative de l’Etat, pourvu que ça dure et que les parasites ne trouvent pas de solution de contournement trop vite (et si, ça y est…) !

Epilogue

La conséquence la plus dommageable de ces démarches à n’en plus finir, c’est que, loin de démotiver les fraudeurs, qui de toute façon n’ont que ça à faire de falsifier des pièces, de renvoyer de la paperasse, ou de trouver de nouvelles combines, elle décourage les « vrais » entrepreneurs, qui n’ont que peu de temps à consacrer à ces tâches non productives. Alors c’est vrai, quand on décide de créer son entreprise, il faut faire preuve de pugnacité et ces étapes sont une manière de la démontrer.

Mais les créateurs d’entreprise manquent souvent de formation et encore plus de conseils pour s’y retrouver. J’ai fait une école de commerce et un mastère de droit des affaires, et pourtant je suis souvent très démunie face à ces problématiques.

A quand un vrai guichet unique sur Internet qui centralise l’ensemble des procédures, facilite leur traitement et leur contrôle, et permet ainsi une focalisation des agents de l’Etat sur les fraudes ? Je vous le demande ! Sans y croire… Mais hauts les cœurs, 2017 nous réservera peut-être de (bonnes) surprises ?? Ou pas…

Le fléau n°1 dans les espaces de coworking…

Vous savez quel est le principal sujet de discorde dans un espace de coworking ? Non ? …Vraiment ?? Et bien figurez-vous qu’un quart des coworkers sont gênés par le bruit !

Source : Deskmag, 2ème enquete globale sur le coworking

D’ailleurs, la riche littérature déjà existante sur le sujet le confirme… Pour autant, nous ne sommes pas les plus mal lotis, puisqu’une autre enquête assure que 52% des français sont perturbés par le bruit dans leur environnement de travail.

Source : Midi Libre

Mais alors, me direz-vous, pourquoi des personnes qui ne supportent pas le bruit viennent-elles dans un espace de travail partagé ? Pourquoi ne restent-elles pas tout simplement chez elles ?

Pour plusieurs raisons :

D’abord, chaque espace de coworking définit des règles de fonctionnement différentes, et dans certains, l’open space est extrêmement calme, voire silencieux. Dans ce contexte, même les plus hostiles au bruit y trouveront leur compte. Mais avant d’avoir essayé en live, difficile de savoir quelle est la règle réellement appliquée… Et pour les autres, l’effet bibliothèque peut être particulièrement angoissant.

Ensuite, ceux qui ont besoin de calme pour se concentrer durant leur temps de travail recherchent néanmoins le réseau et la convivialité offerts par les espaces de coworking. Ce n’est pas forcément antinomique : il y a un temps pour tout. De la même manière, la contradiction apparente d’indépendants qui s’installent dans un même lieu, n’en est finalement pas une, puisqu’ils gardent leur liberté, tout en bénéficiant de services mutualisés.

Enfin, la collectivité n’exclut pas la prise en compte de l’autre et de ses besoins : on peut être voisins de bureau sans pour autant s’interpeller toutes les 30 secondes au milieu de l’espace de travail.

Comment expliquer que nous ayons tous une sensibilité tellement différente au bruit ?

En effet, interrogez les coworkers d’un même espace : vous aurez probablement une réponse différente par personne.

La raison de ces écarts est à la fois simple et complexe :

1/ La question de la politesse, du respect

Nous avons tous été élevés à coups de codes sociaux et de règles de vie, par des parents qui nous ont conditionné selon leur culture et leurs convictions : certains dans la discrétion, voire la retenue, d’autres dans l’expression, voire l’exubérance. Sans parler du trait renforcé par le tempérament de chacun, timide ou volubile.

Conclusion ? Nous sommes persuadés, tous autant que nous sommes, d’être la « référence » en matière de politesse et de savoir-vivre. Par conséquent, les comportements divergents sont, de fait, considérés comme irrespectueux.

2/ La question de l’histoire personnelle

Evidemment, les anciens salariés qui ont passé des années en open space à 60 par plateau, habitués à un niveau sonore élevé, sont plus tolérants au bruit que les freelances qui ont plutôt travaillé seuls à domicile auparavant. La problématique est d’autant plus vraie quand une équipe, habituée à un autre mode de fonctionnement, débarque à plusieurs en coworking, avec l’inévitable tentation de garder ses anciennes habitudes.

3/ La question du métier

Quand certaines professions s’accommodent bien d’un bruit ambiant, soit parce que la concentration n’est pas requise, soit parce que c’est avant tout un métier de contact, avec beaucoup d’appels téléphoniques par exemple, d’autres ont des professions qui nécessitent de s’immerger dans une problématique qui implique de rester focalisé sur sa tâche sur une durée assez longue en continu : travaux rédactionnels, développement informatique… La moindre interruption peut faire perdre beaucoup de temps ensuite pour se remettre en situation.

4/ La question de la perception

Selon sa personnalité et son fonctionnement, on peut se focaliser sur certains bruits parasites, ou encore avoir du mal à faire abstraction d’une conversation qui se déroule dans le même espace de travail.

La notion de « capital-sympathie » a aussi un rôle évident dans la perception que l’on a du bruit alentour : lorsqu’il s’agit de ses collègues directs, on est, premièrement, souvent dans un rythme de travail proche, avec des besoins de concentration similaires et donc, plus en phase. D’autre part, le fait de ne pas appartenir à la même entreprise crée de fait un fossé qu’il s’agit de combler : ça se passe à la pause café, aux repas partagés… Une fois qu’on s’est « attaché » à ses voisins de bureau, on devient beaucoup plus tolérant et on a plus de facilités à faire une remarque lorsqu’on est dérangé, sans pour autant le faire de manière désagréable.

Comment maintenir le bruit à un niveau acceptable pour le plus grand nombre, tout en conservant la convivialité ?

D’abord, nous voulions partager avec vous le résultat d’une récente étude, qui conclut que le bruit a un effet positif sur la créativité !

Bon, bah alors, faudrait savoir ?!

Oui, mais tout est une question de mesure… En effet, il a été démontré que « les personnes exposées à un bruit modéré (70db) et non désiré (ce n’est pas comme la musique qu’on écoute avec son casque) étaient plus susceptibles de trouver des solutions créatives et que ces idées étaient plus originales. Par contre, lorsque le bruit est plus important (85dB, ce qui équivaut au bruit de la circulation sur une route principale à une distance de 10 mètres), il inhibe la capacité de traiter l’information, et donc engendre une perte de créativité. ». Source : ZeVillage

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Vous pouvez aussi découvrir une application qui propose des ambiances sonores de cafés, dans ce même esprit de bruit raisonnable incitant à la créativité : www.coffitivity.com

Alors, comment faire pour trouver ce juste milieu au sein d’un espace de coworking ?

1/ La conception de l’espace

  • Concevoir un espace dont l’open space n’est pas surdimensionné
  • Envisager la multiplication de petits open spaces, dans lesquels le niveau sonore admis est variable
  • Prévoir des zones pour laisser libre cours à la convivialité : salon, cuisine, jardin…
  • Prévoir des zones pour permettre aux équipes de travailler ensemble : salles de réunion
  • Prévoir des zones pour les appels téléphoniques : cabine téléphonique
  • Evidemment, certaines zones peuvent être allouées à plusieurs usages, en fonction des moments de la journée ou grâce à un système de réservation
  • Proposer des bureaux fermés
  • Réfléchir aux circulations dans l’espace pour éviter des passages trop nombreux par l’open space
  • Penser à des zones tampon entre la porte d’entrée et l’open space, même chose avec les toilettes (surtout s’il y a un sèche-mains électrique !)
  • Penser aux matériaux utilisés dans l’open space, en vous assurant que certains absorbent le bruit plutôt que de le réverbérer

2/ Les aménagements de l’espace

  • Réaliser un cloisonnement partiel des zones ouvertes
  • Aménager des alcôves plus protégées du bruit
  • Installer des absorbeurs de bruit

3/ Les règles de vie communes

  • Définir le niveau sonore accepté dans chaque zone de l’espace
  • Définir ce qui est accepté ou non en open space : appels téléphoniques, réunions, conversations à haute voix…
  • Faire signer à chaque coworker le règlement intérieur qui explicite ces règles
  • Proposer aux futurs coworkers d’effectuer une journée d’essai : c’est l’occasion de vérifier que l’environnement de travail leur convient et que leur propre activité est compatible avec celle des autres

4/ La sensibilisation

  • Parler ! Avant que le problème prenne trop d’ampleur…
  • Utiliser l’humour, dépassionner le débat
  • Rappeler les règles de l’espace et les zones de dégagement à disposition
  • Enregistrer le bruit dans l’open space pour faire s’écouter les coworkers et leur faire prendre conscience du volume sonore
  • Objectiver la question du bruit en utilisant l’outil « Inside Voice » (application mobile) qui permet de définir un niveau sonore acceptable pour tous, et de recevoir une alerte lorsque ce seuil est dépassé

5/ Les outils individuels

  • Suggérer aux coworkers de travailler avec un casque
  • Suggérer les boules Quiès ( !)
  • Proposer un usage nomade du coworking, réservé aux tâches du coworker compatibles avec cet environnement

Pour aller plus loin à propos des solutions pratiques, vous pouvez aussi consulter l’article de Cowork.io sur le sujet.

En conclusion, nous avons tous une sensibilité très différente au bruit. Quand certains se satisfont très bien d’un brouhaha, ou en tout cas d’un bruit de fond constant, d’autres vont être incommodés par les bruits extérieurs beaucoup plus rapidement.

Les espaces de coworking se doivent de prendre en considération ces attentes souvent hétérogènes, en réalisant les installations et en conduisant les actions permettant d’arriver à un équilibre satisfaisant pour le plus grand nombre. Malgré tout, il est certain que les personnes allergiques à tout bruit parasite vont se sentir « agressées » dans la majorité des espaces de coworking : il faut peut-être dans ce cas opter pour un bureau fermé, ou envisager un autre type d’hébergement professionnel.

Opportunités business dans un espace de coworking : mythe ou réalité ?

Le Mythe

Tous les acteurs du coworking, et plus largement, de l’économie collaborative, s’accordent à dire qu’intégrer une communauté professionnelle génère des opportunités business pour ses membres. Mais quand on cherche des chiffres pour étayer ce postulat… C’est le désert de Gobi. Alors on s’est penché sur la question.

Lors de la semaine d’ouverture du 50 Coworking, près d’une centaine de personnes est passée nous voir. L’un des visiteurs, qui se reconnaîtra sûrement, avait le sentiment qu’un espace de coworking était pertinent pour mutualiser des ressources et des locaux, mais doutait fortement de la capacité de ses membres à travailler ensemble, ou les uns pour les autres. Quelques semaines plus tard, c’est ce même visiteur qui a été sollicité par l’une des équipes installées dans l’espace pour une mission… Comme quoi, il n’est même pas nécessaire d’y croire pour que ça se réalise !

Durant une récente conférence, le coworker d’un autre espace partageait son expérience et disait avoir remboursé son coût d’hébergement grâce aux contrats que les coworkers lui avaient rapportés. Tous les métiers ne permettent pas un tel retour, car certains ciblent des marchés de niche ou une clientèle bien différente des coworkers présents dans l’espace. Pour autant, même pour ces derniers, le réseautage peut indubitablement accélérer certaines étapes du développement de l’entreprise grâce au bon contact au bon moment.

La Réalité

JardinNous allons parler de ce que nous connaissons, en vous donnant quelques témoignages des coworkers du 50 Coworking.

Au 50, l’écosystème est déjà très riche 6 mois après l’ouverture, puisque l’espace compte plus de 25 coworkers : graphisme, communication digitale, développement durable, édition de logiciels, développement informatique, assistance administrative, achats, relation clients, bureau d’étude…

Cette hétérogénéité apparente crée une véritable richesse.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce ne sont pas nécessairement les acteurs d’un même secteur qui vont travailler ensemble.

Des contrats remportés ensemble

Alors que les membres de l’Agence Penrose (Alexandre, Clément et Julie), spécialiste en communication digitale, cherchaient un créatif pour réaliser le logo d’un nouveau client, ils en parlent à Elsa Lecoq, graphiste et directrice artistique, autour d’un déjeuner : ils avaient déjà eu l’occasion de sympathiser, mais pas encore vraiment de voir le travail d’Elsa. Après avoir parcouru son site web ensemble, l’Agence Penrose est séduite : ils décident de collaborer pour répondre plus globalement au client, proposant une offre complète de création d’identité visuelle de la marque et de création de site web.

Des missions pour des coworkers, par d’autres coworkers

Alors que Tatienne Laplanche, architecte et graphiste, avait réalisé l’identité visuelle de l’espace de coworking en amont de son ouverture, elle a décidé de venir y travailler ensuite ponctuellement en tant que nomade. Au moment des fêtes de fin d’année, EffiCRM (Anne, Sylvain, Patricia et Emilie), qui propose du conseil et de la formation en relation clients, a voulu réaliser des cartes de vœux et une vidéo d’équipe. C’est tout naturellement qu’ils se sont tournés vers Tatienne pour réaliser ces supports.

Pendant ce temps, Elsa Lecoq a été embauchée par Emilie, membre de l’équipe EffiCRM, pour créer un visuel grand format pour l’élevage d’agneaux de sa moitié…

Très vite challengé sur le sujet à son arrivée dans l’espace, Romain, qui réalise des diagnostics énergétiques pour des bâtiments tertiaires avec son entreprise Envi’Energie Conseils, s’est finalement décidé à travailler à la création de son site web avec l’Agence Penrose et Elsa Lecoq.

Après avoir organisé plusieurs ateliers collectifs autour du référencement, des réseaux sociaux professionnels…, Thierry Pigot, expert WordPress, a réalisé du consulting relatif à WordPress et à la SEO, en amont de la refonte du site web de OHM Force (Franck et Grégory), éditeur de logiciels installé au 50.

Bertrand Pinon, coworker nomade, a commencé par proposer des ateliers collectifs de co-développement au 50 Coworking. Suite aux premiers ateliers, il a déniché 2 coachés individuels au sein de l’espace.

Des services mutualisés

Un espace de coworking, c’est aussi le moyen d’accéder à des services que vous n’auriez pas pu obtenir à l’extérieur : Florence Zalucki, Votre assistante préférée, propose déjà à 4 entreprises du 50 ses prestations d’assistance administrative.

De la même manière, Claudine Grin, photographe, a donné l’opportunité à une vingtaine de coworkers de repartir avec un portrait très pro, pour un budget très Co.

Et tout cela, sur place, évidemment…

En conclusion

En prenant en compte l’ensemble de ces témoignages, d’après nos calculs…

100% des coworkers ont déjà bénéficié de l’effet Co au 50 Coworking !

Attention : ces missions entre coworkers n’auraient probablement pas existé sans les petits gestes d’entraide du quotidien… Pour ma part, je tiens à remercier énormément Clément de l’Agence Penrose, pour son aide variée et régulière notamment sur le site web du 50, Elsa Lecoq pour son oeil créatif (et plus !) sur les visuels de l’espace, Franck de OHM Force (et encore Clément) pour la configuration de la v2 du réseau Internet… Et j’en oublie sûrement.

Evidemment, pour que la mayonnaise prenne, le rôle d’un espace de coworking est aussi d’organiser des moments conviviaux qui invitent les coworkers à mieux se connaître et à sortir du cadre strictement professionnel : repas, apéros, goûter des enfants, marché de Noël, expositions… L’idée étant aussi que les coworkers eux-mêmes prennent laMarché relève ! Ces derniers mois, nous avons ainsi fait un tour du monde culinaire grâce à Sylvain d’EffiCRM (La Réunion), Anne d’EffiCRM également (Vietnam), Julie de l’Agence Penrose (Italie), Elsa Lecoq (Pologne)… qui ont chacun animé un repas collaboratif. Camille, non content d’avoir fait découvrir son élevage d’agneaux aux enfants des coworkers, a aussi joué le coach lors du lancement de notre potager.

Chacun membre de cette communauté bénéficie chaque jour de la générosité et de l’envie de partage qui règnent en ces lieux. Vous voulez en savoir plus sur ces supers coworkers ? Découvrez leur portrait.

Et pour ceux qui seraient encore dubitatifs quant à la valeur du collectif, venez tester la puissance de la communauté professionnelle : la journée d’essai est gratuite au 50 Coworking, il suffit de réserver votre place la veille !

A bientôt,

La dream team du 50

Comment j’ai échappé au burn-out grâce au coworking

Graphiste, j’ai travaillé en agence pendant plus de 10 ans : trajets interminables, horaires à rallonge, pression hiérarchique… J’ai assumé ce rythme en repoussant mes limites, mais elles m’ont rattrapée à la naissance de mes enfants : j’ai dû me rendre à l’évidence, j’étais bel et bien sur les rotules. J’ai pris la décision de me mettre à mon compte et de travailler de chez moi. Quel luxe et… quelle solitude !
Alors, j’ai découvert le coworking. Et ma vie a changé.

8:30 – Enfants déposés à l’école

Je prends la nationale et je savoure le soleil matinal qui transperce la brume flottant encore au-dessus des champs de colza. Une belle journée s’annonce. Au passage, je récupère un coworker à la gare pour finir le trajet ensemble.

8:45 – Arrivée à destination

Je bifurque sur la gauche en apercevant le grand bâtiment en bois qui héberge mon bureau depuis quelques mois.
Je salue mes voisins de bureau et nous partageons un café : j’apprends que l’un d’entre eux va être papa pour la première fois ! Chacun y va de son petit conseil sur la gestion des humeurs d’une femme enceinte…

9:00 – Le travail m’appelle !

Installée à mon bureau en open space, j’ai une vue imprenable sur la campagne environnante. Je consulte mes mails et réponds aux plus urgents.
Lors d’un atelier organisé dans l’espace, j’ai découvert la méthode Pomodoro : je l’utilise pour évacuer mes tâches administratives. J’octroie une période de 20 minutes à chaque sujet, pour lutter contre la lassitude et surtout éviter la procrastination. 2 heures plus tard, tout est bouclé.

11:00 – La pause s’impose

L’odeur du café chaud m’attire vers la cuisine. Je m’en sers une tasse. Tiens, quelqu’un a ramené des madeleines faites maison. Un groupe de coworkers est en train de brainstormer autour d’une vidéo que l’un d’entre eux finalise pour une campagne de communication digitale. Je m’invite dans leur discussion.

11:15 – Back to work

Dans l’open space, une grande concentration règne : chacun est absorbé par son ordinateur. Mon téléphone vibre : je vais m’isoler dans la cabine téléphonique pour répondre à mon client, qui a visiblement des corrections à faire sur le catalogue que je lui ai envoyé la veille. Je retourne à mon bureau pour réaliser les modifications demandées. A 12h, le document est finalisé !

12:30 – Atelier cuisine

Je partage très souvent le déjeuner des autres coworkers, mais ce midi est un peu particulier. Aujourd’hui, comme chaque mois, tous les coworkers se retrouvent autour d’un repas collaboratif : cette fois-ci, nous profitons des origines vietnamiennes de l’une des coworkeuses pour apprendre à cuisiner le porc au caramel. La chef du jour nous donne ses consignes et nous raconte l’histoire de son plat. Tout le monde se met à la tâche, un verre à la main et le cœur à l’ouvrage.

13:00 – Déjeuner et réseautage

Le repas est prêt : nous passons à table. L’un des coworkers nous présente son projet de création d’une boutique en ligne. Un autre coworker connaît justement un contact prometteur dans son secteur d’activité…

13:45 – Sieste

Je m’installe dans le coin sieste pour accélérer la digestion… 15 minutes plus tard, mon réveil sonne : je suis 100% opérationnelle.

14:00 – Back to work

Je consulte mes mails : je viens de gagner un nouveau client, il a validé mon devis ! Je partage la bonne nouvelle sur notre groupe Facebook et je propose de fêter ça un soir de la semaine. Plusieurs coworkers répondent tout de suite présents et me félicitent.
Je me remets au travail. Des voix me parviennent en sourdine de la grande salle de réunion à l’autre bout de l’espace : un séminaire de créativité est en cours, organisé par une belle entreprise de la région.

16:00 – Pause café

Je m’arrache les cheveux sur la mise en page de mon site web… J’en parle avec l’un des coworkers qui travaille dans ce domaine : en 3 minutes, il m’a trouvé la solution. Et voilà une pause café qui m’a fait gagner au moins une heure !
Ca sonne à la porte. Le facteur arrive avec le colis que j’attendais : voilà qui m’évite de faire le tour de la terre pour dégotter LE cadeau d’anniversaire parfait pour mon mari (une édition collector d’un vieux vinyle).

16:30 – Back to work

Je reprends là où j’en étais restée : mon dossier est quasiment bouclé. Je peaufine, je demande l’avis de mes voisins… A 18h, je valide et j’appuie sur le bouton. Je suis arrivée au bout de ma to do list du jour. Trop fière !

18:00 – Studio photos

Ce soir, une photographe professionnelle propose ses services à des prix très « coworking » pour faire nos portraits : je suis étonnée par le résultat, moi qui ne suis jamais photogénique ! Ca va être top sur mon profil LinkedIn.

19:00 – Home sweet home

15 minutes après avoir quitté l’espace de coworking, je récupère mes enfants à la garderie. J’attends avec impatience la semaine prochaine : nous allons créer un potager partagé, une bonne occasion de m’initier à ce loisir pour ensuite essaimer l’idée à la maison. Détendue, je profite pleinement de ma soirée en famille.

23:30 – Extinction des feux

Allongée dans mon lit, je pense à la journée du lendemain avec sérénité : elle s’annonce aussi simple et passionnante que celle que je viens de vivre.

Le coworking pour les nuls

ARTICLE CREE EN FEVRIER 2016
Avant de rentrer dans le vif du sujet, petit rappel sur ce qu’est le coworking : il s’agit de partager un espace physique de travail à plusieurs (indépendants, TPE, salariés nomades), afin de mutualiser un lieu et des outils, de gagner en souplesse, et surtout de se créer et d’entretenir un réseau professionnel riche, grâce à une animation quotidienne du lieu.

Voir la définition du coworking sur Wikipedia

La genèse du coworking

Né en 2005 aux Etats-Unis, le coworking a rapidement débarqué en France (dès 2008), pour connaître ensuite une croissance fulgurante : aujourd’hui, il existe plus de 250 espaces de travail collaboratifs en France. D’après le magazine digital dédié au coworking, ces espaces seront plus de 10.000 d’ici la fin de l’année 2016 dans le monde.

Voir la dernière enquête de Deskmag : 2016 Coworking Forecast

Pour une fois, la France a réussi à se maintenir sur la troisième marche du podium en terme de nombre d’espaces, d’après une récente étude : cocorico !

Voir l’étude complète de La Fonderie

Les modèles et les acteurs de ce marché

D’abord largement indépendants, les premiers espaces ont rapidement été concurrencés par de nouveaux entrants issus du secteur de l’immobilier d’entreprise et par de très grandes entreprises, qui ont flairé les perspectives de ce nouveau marché, d’autant que leurs créneaux traditionnels sont en mauvaise posture. Parmi eux, Bouygues Immobilier, Nexity, La Poste, la SNCF…

martine en voyageOn a vu également le coworking se structurer, avec des acteurs natifs de ce marché qui ont changé d’échelle : WeWork, leader américain sur ce marché, a levé des fonds à hauteur de 355 millions de dollars pour s’attaquer au marché européen, tout comme certains acteurs français cherchent à atteindre une taille critique. Certains autres ont modifié leur stratégie pour pivoter vers d’autres marchés, comme Numa qui se concentre sur l’accompagnement de start-ups, ou comme Mutinerie, qui après avoir fait ses preuves dans un modèle 100% parisien, s’est lancé dans le coworking rural avec Mutinerie Village. Enfin, des déclinaisons du modèle initial voient le jour, avec le coworking à domicile, en vacances, en van, sur un voilier… Un peu comme la série de livres pour enfants « Martine » !

En parallèle de ces grandes manœuvres, notre service public tente de s’approprier les codes de ce nouveau marché et d’accompagner les projets : plusieurs régions, et notamment l’Ile de France, organisent des appels à projets destinés à soutenir ces initiatives ; de nombreuses municipalités et communautés de communes envisagent également de porter directement de nouveaux projets d’espaces.

En effet, le marché, malgré sa spectaculaire progression, reste naissant et ne couvre encore que de façon très parcellaire le territoire national : si Paris est maintenant bien pourvu, c’est loin d’être le cas des zones péri-urbaines et rurales. Pourtant, il semble évident que ces zones encore inexplorées sont un creuset particulièrement prometteur : entre les problématiques de transports pendulaires et de connectivité entre bassins de vie et d’emploi, l’isolement des travailleurs à domicile et les limitations techniques notamment de débit internet, les raisons d’opter pour un espace de coworking rural comme lieu de travail sont nombreuses. 

Les perspectives

Mais le coworking est-il une mode ou une vraie tendance de fond ? En prenant un peu de recul sur les évolutions de notre société et du monde du travail, on peut clairement opter pour la seconde hypothèse.

3 facteurs sous-tendent le développement des espaces de travail partagés :

Une augmentation constante et significative du nombre d’indépendants

D’après une étude HopWork et Manifesto EFIP, le nombre d’indépendants a connu une croissance incroyable de 85% en 10 ans en France, atteignant 700.000 personnes en 2013 ; la France est particulièrement active sur le sujet, mais la tendance est néanmoins partagée partout en Europe, puisque le nombre d’indépendants a globalement augmenté de 45% sur la même période.

Une préoccupation nouvelle pour l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle

Le sujet de la qualité de vie est maintenant un axe de communication de beaucoup d’entreprises pour convaincre leurs nouvelles recrues et fidéliser leurs salariés. Pour ce faire, plusieurs leviers sont utilisés, notamment celui de la souplesse du travail : télétravail, travail nomade, horaires décalés, management par les objectifs plutôt qu’un management présentiel et très hiérarchisé… Pour les entreprises les plus frileuses à l’idée du télétravail, les espaces de coworking peuvent constituer une véritable alternative, puisqu’ils proposent un espace de travail réellement professionnel, parfois labellisé (voir le label c3) et structurant pour le salarié (pas de tentation TV, lave-linge…).

Une sensibilité accrue pour 2 philosophies : le collaboratif et le développement durable

20150722 croquis ambiances Le 50002-2 sans légendeEst-ce un effet de l’entrée dans le monde du travail de la génération Y ? En tout état de cause, on ne travaille plus en 2016 comme il y a 20 ans : la logique de hiérarchie pyramidale est en train de laisser la place à une gestion en mode projet, dans laquelle chaque acteur se voit responsabilisé. Un modèle qui a lui aussi ses travers, puisqu’il conduit à une externalisation de certaines ressources pour n’y faire appel qu’à la demande, ce qui induit une précarisation d’une partie des travailleurs. Pour autant, vivent-ils moins bien ? Ils ont souvent un pouvoir d’achat à la baisse, mais compensent par une plus grande liberté, des choix plus personnels, des projets plus variés…

Souvent, cette sortie du classique salariat s’accompagne d’une prise de recul sur d’autres sujets, notamment le rapport à la nature et à l’environnement : la sensibilité au développement durable est en effet plus grande chez les personnes qui ont pris leur vie en main et voient donc l’étendue des possibles qui s’offrent à eux dans bien des domaines : éducation, consommation, alimentation, transports… Le succès du film Demain le prouve : les français sont en pleine prise de conscience et veulent faire changer les choses ! Quoi, vous ne l’avez pas encore vu ??

Ces choix conduisent invariablement à la même conclusion : l’union fait la force. D’où une appétence supérieure pour le collaboratif, qui aide à fédérer et à organiser de nouveaux modes de vie.

Quelques exemples de l’économie collaborative, moins connus que BlaBlaCar ou Uber :

La Ruche Qui Dit Oui

Mouvement Colibris

Le concept du coworking est donc probablement parti pour durer, c’est le sens de l’histoire. Encore que… son avenir va dépendre de ce qu’en font les acteurs de ce marché.

Quel modèle choisir : mini ou maxi ?

Aujourd’hui, les nouveaux entrants « big size » font-ils vraiment du coworking ? Si l’on repart de la définition donnée en introduction, on peut se poser la question :

La mutualisation de moyens ?

20151026BlandineCain-27Certes, ces espaces de coworking de la seconde vague ont revu à la baisse leur grille tarifaire, mais ils intègrent l’espace de « coworking » à un ensemble immobilier souvent beaucoup plus vaste, et en font un produit d’appel parfois assez marginal : prenons l’exemple de NextDoor, espace ouvert en 2015 à Issy les Moulineaux. Installé dans un immeuble de 6 étages qui compte 2600m2, seule une partie du rez-de-chaussée est dédiée au coworking, quand les autres étages sont privatisés, comme dans n’importe quel autre immeuble de bureau.

La souplesse ?

Un véritable effort a été fait pour s’adapter aux évolutions du marché, mais souvent, l’engagement est tout de même de 12 mois. Si on sort du classique bail 3/6/9, on est encore loin d’une flexibilité totale. En termes d’horaires, les grands entrants restent fidèles à leurs habitudes avec des horaires de bureau classiques, alors que pendant ce temps, certains espaces installés Outre-Atlantique ont depuis longtemps rebattu les cartes, avec des espaces utilisés en 3×8 : on peut venir travailler la nuit et dans ce cas, payer moins cher que les travailleurs diurnes !

Le réseau, la convivialité ?

20151026BlandineCain-6Tous les espaces (ou presque), quelle que soit leur taille, organisent des événements destinés à créer du lien entre les coworkers. De ce point de vue, les plus gros acteurs ont souvent l’avantage de disposer d’une équipe étoffée, qui peut donc proposer plus d’animations, mais le pendant est que la relation est moins personnalisée et l’équipe est parfois moins motivée (salariés et non créateurs…), avec un turn-over plus important. Ensuite, comment créer les mêmes liens entre 200 personnes, lorsque l’espace s’étend sur plus de 2000 m2, qu’au sein d’un groupe d’une quarantaine de coworkers, qui partagent un espace d’une taille plus réduite ? Enfin, il est nécessairement plus compliqué de construire un véritable écosystème lorsqu’on s’adresse avant tout à une population totalement nomade, pour quelques heures et de manière très ponctuelle, comme c’est le cas pour les hubs imaginés par la Poste ou la SNCF.

IMG_9112Selon vos besoins, vous aurez par conséquent le choix parmi une large palette d’offres assez différentes. Au-delà des critères objectifs, n’oubliez pas de prendre en compte l’ambiance : c’est un facteur déterminant mais très personnel, qui conditionnera évidemment votre choix. Pour certains, le fait de retrouver une prestation normée et sans surprise dans plusieurs espaces de la même marque constituera un véritable confort. Pour d’autres, au contraire, l’idée d’appartenir à un lieu unique en son genre résonnera positivement. Le feeling avec le ou les animateurs du lieu et avec les coworkers déjà présents sera donc lui aussi décisif.

Comment trouver un espace de coworking ?

20151026BlandineCain-12Vous souhaitez tenter l’expérience ? La cartographie la plus complète à l’heure actuelle est celle de www.copass.org, qui recense une très grande majorité des espaces de coworking dans le monde entier. Et dès que vous êtes devenu coworker, elle vous donne accès à des journées gratuites dans la plupart des autres espaces, un vrai plus pour pouvoir accéder à des espaces indépendants tout en conservant une vraie mobilité.

Sachez que certaines plateformes de référencement ont également été créées, mais fonctionnent selon le même modèle économique que Booking.com par exemple : ces sites prennent une commission sur les ventes réalisées. Si vous avez repéré par vos propres moyens un espace de coworking, pensez donc à réserver directement via son site Internet, sans utiliser ces plateformes qui dégradent leur marge. Si vous ne trouvez pas ce que vous cherchez, dans ce cas ces plateformes ont toute leur utilité !

Principaux sites de référencement :

BAP

Neo-nomade

Bird Office

Découvrez Le 50 Coworking à Méré

Vous habitez dans le sud-Yvelines et cherchez un espace de coworking performant et convivial ? Le 50 Coworking s’est installé à Méré depuis octobre 2015 et vous propose un espace de travail tout neuf, design, ergonomique, agréable à vivre…

Déjà 22 coworkers se sont laissés séduire par cet espace de 230 m2, au milieu des champs, mais très facilement accessible en voiture, en train ou en bus. A peine 4 mois après son ouverture, un véritable écosystème s’est mis en place, et les coworkers ont trouvé de nombreuses synergies entre leurs métiers (graphisme, communication digitale, conseil en relations clients, efficacité énergétique, assistance administrative, édition de logiciels…) : autant d’opportunités professionnelles qui les aident à grandir. Surtout, une ambiance chaleureuse donne à tous l’envie de venir travailler le matin, dans un climat de saine émulation. Chaque semaine, au moins un événement est proposé et une animatrice est présente au quotidien pour faciliter la vie de chacun. Des services et prestations très utiles sont également disponibles, comme la domiciliation, la location de salles de réunion, ou encore des plateaux repas.

Il ne reste que quelques places : visitez le site www.le-50.fr ou passez découvrir l’espace lors de l’une des Journées Portes Ouvertes, chaque dernier lundi du mois (de 8h45 à 18h). Pour suivre toute l’actualité, inscrivez-vous à notre groupe Facebook : Voisins de bureau.

A bientôt au 50 ou ailleurs,

Blandine CAIN

Fondatrice et animatrice du 50 Coworking